Soins et accompagnement humain
Thabarwa, Thalyin, Birmanie
Décembre 2019
Comme expliqué lors de l’introduction de notre projet (ici), nous avons plié bagage il y’a maintenant plus de deux mois pour un tour du monde à visée humanitaire. Par humanitaire, nous sous-entendons au plus proche des populations locales et de l’humain, afin d’apprendre de nos différences et grandir intérieurement.
Après avoir examiné sur la plateforme HelpX les deux missions disponibles en Birmanie (faible nombre probablement dû à l’ouverture récente du pays), nous voilà en route pour le centre de méditation bouddhiste Thabarwa, à 20 min de l’ancienne capitale Yangon, dont nous avons lu beaucoup d'expériences de volontaires marqués par leur séjour.
Thabarwa est une organisation humanitaire non gouvernementale travaillant pour une cause noble, mais surtout, un refuge pour les gens dans le besoin (SDF, personnes âgées, malades, infirmes, aveugles, sourdes, handicapées et psychologiquement instables). Il abrite actuellement plus de 4000 personnes, dont 1000 patients, répartis dans différents hôpitaux et halls. Ce sanctuaire accueille tout le monde sans discrimination et offre abris, repas et enseignements spirituels gratuitement.
Thabarwa est fondé sur les principes mêmes du bouddhisme (pour une petite piqûre de rappel sur cette philosophie, c’est par ici), ce qui implique que tout le monde est encouragé à faire de bonnes actions et du bien autour de lui (que ce soit patients, volontaires ou personnes lambda se rendant au centre). Il a même été créé pour éduquer des bénéfices et résultats de la générosité. Les bouddhistes et personnes inspirées par cette philosophie considèrent qu’en faisant le bien, ils attireront et conditionneront le bien dans leur vie.
C’est pourquoi le centre encourage également la pratique de la méditation. Pour faire le bien, les personnes doivent être au clair avec elles mêmes, et les enseignants du centre considèrent que sans la méditation, l’esprit est indisponible pour faire le bon au sein de Thabarwa à cause de la colère, l’inquiétude, la peur, l’incompréhension ou tout autre émotion perturbatrice. Dans ce sanctuaire, “la plupart des gens ne sont pas riches, pas jeunes mais la plupart des esprits sont sains, avec beaucoup moins d’attachement malsain que d’autres personnes de la société”.
Concernant les activités au sein de Thabarwa, la particularité est la liberté accordée aux volontaires: les personnes peuvent participer selon leurs souhaits et leurs compétences. Il n’y a aucune obligation, ni aucune attente. Les activités “organisées” (décrites ci-dessous) et les personnes y participant sont décidées la veille au cours d’un meeting quotidien.
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Le “Clinic Taxi” consiste à aller chercher certains patients ayant besoin de physiothérapie en chaise roulante aux différents hôpitaux pour les emmener à la clinique. Il faut ensuite les aider à faire leurs exercices de rééducation puis les ramener.
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Le “Basic Care” inclut les changements de couches et de poches des patients.
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Le “Patient Care” consiste à nettoyer et guérir les blessures diverses (escarres, crevasses, plaies, etc.)
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Le “Patient Washing” implique comme son nom l’indique, la douche des patients. A savoir que beaucoup de patients n’ont le droit qu’à une douche par semaine seulement, à cause de leur infirmité et du petit nombre de volontaires disponibles face au grand nombre de patients.
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La “Positive Health” consiste à aller d'hôpitaux en hôpitaux remplir les bouteilles d’eau des patients mais également leur proposer une activité “positive” visant à les faire rire et à leur changer les idées (coiffure, maquillage, manucure, etc).
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Participer à l’aumône des moines le matin pour collecter les donations et la nourriture de la journée.
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Construction d’infrastructures supplémentaires.
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Aide à la cuisine, au nettoyage et autres activités diverses du centre.
Étant totalement libres, il est également possible de rendre visite aux patients et personnes pour simplement égayer leur journée, ou les emmener à la Pagoda du centre pour prier. Encore une fois, nous sommes libres de faire le bien comme bon nous semble.
Notre journée type: lever vers 6h45 pour un petit déjeuner préparé de donations collectées lors de l’aumône du matin. Ensuite, l’heure de notre activité préférée: le “Clinic Taxi”. Au cours de notre séjour, nous lions des liens avec ces personnes ayant besoin de rééducation quotidiennement. Nous privilégions la répétition de cette activité pour ne pas couper ce lien trop brutalement. Ces séances se transforment même bien trop souvent en petit café klatsch. Pendant 4h par jour, nous déambulons avec nos petits patients dans tout le village de Thabarwa sur un terrain plutôt accidenté. C’est souvent bien rigolo!
Après un déjeuner plutôt copieux, également fait des donations du matin, on adore rendre visite aux patients dans les hôpitaux sans but précis afin d’égayer leur journée. Nous ne nous sentons pas prêtes pour le soin direct aux patients, par peur d’être maladroites et d’avoir des réactions irrespectueuses. Ce sera peut-être pour une autre fois!
La plupart des patients infirmes, handicapés ou aveugles restent toute la journée dans leur lit car il leur est impossible de se déplacer seul. Ayant compris l’importance de la spiritualité et la place du bouddhisme dans la vie de ces personnes, notre activité favorite devient naturellement d'amener ces personnes à la Pagoda du village pour prier, discuter ou simplement se retrouver seul avec un peu d’intimité.
Nous nous lions fortement d’amitié avec Aung, qui doit faire de la rééducation tous les jours pour pouvoir déplier ses jambes. On lui tient la main lors de ses douloureuses séances de physiothérapie, et on l’emmène prier à la Pagoda tous les jours. Nous sommes tellement émues lorsqu’on le voit heureux de pouvoir s’y rendre. Il en profite même pour sortir sa plus belle chemise blanche! Les aurevoirs sont douloureux et on espère que d’autres volontaires s’y attacheront autant que nous.
Vivre cette expérience était très intense et nous sommes passées par différentes émotions. La première étant le choc sensoriel: les personnes souffrantes, les odeurs de maladie et de pauvreté, la propreté, et parfois même les cris de douleur. On s’efforce de garder la face, de rester fortes et on se convainc que cela nous atteint moins qu’on ne le pense. Mais la dureté de la réalité se fait bien ressentir. La deuxième émotion, c’est la culpabilité. Pourquoi eux? Pourquoi pas nous? Nous sommes tellement chanceux, comment pouvons nous fermer les yeux? Comment pouvons-nous vivre sans penser aux gens qui souffrent? La troisième est l’envie de tout chambouler, presque de la colère: nous devons les aider, nous devons faire bouger les choses, il n’y a pas assez d’organisation, etc. On en veut à la terre entière. Puis vient la phase de l’acceptation: on peut aider, à notre petite échelle. En propageant et récoltant des sourires. En partageant notre expérience pour sensibiliser à la bienveillance, à la solidarité et à une philosophie tellement belle.
Si vous souhaitez faire une donation directement au centre, cliquez ici.