Tanzanie
(15/10 - 06/12)
Après plus de six mois d’interruption et d’interrogations, nous voilà reparties, prêtes pour de nouvelles aventures. Cap sur un tout nouveau continent: l’Afrique. Peu de tourdumondistes s’y risquent (préjugés, sécurité, budget), lui préférant largement l’Asie et l’Amérique. Et pourtant, nous n'imaginions pas notre tour du monde sans une touche africaine. Parce que si on associe facilement (et parfois à tort) le continent à la pauvreté, on oublie vite sa richesse historique, géographique, ethnique, artistique, culturelle et humaine.
C’est donc tout naturellement que nous optons pour la Tanzanie, synonyme de biodiversité, aventure et authenticité. Entre instants détente sur les plages de l’archipel de Zanzibar, treks dans la région du Kilimandjaro, safaris dans les plus grandes réserves animalières et rencontres avec des populations aux traditions millénaires, nous avons hâte de découvrir ce pays aux multiples promesses.
Sommaire
Zanzibar (15/10 - 22/10)
Arrivées à Stone Town (Zanzibar) le 15 octobre au matin, après plus de 25 heures de voyage. Rassurez-vous, les conditions de vol ont été plus qu’exemplaires, la compagnie aérienne nous ayant fourni visière, masque, gants et gel hydroalcoolique. Un peu suffocantes toutes ces précautions, mais on ne va clairement pas se plaindre et mesurons notre chance!
Notre visa effectué et nos bagages récupérés, nous sommes accueillies par le manager de notre futur hôtel (Kalfan) à la sortie de l’aéroport. Malgré la fatigue, nos sens sont en éveil et nous sommes de suite frappées par la chaleur environnante, que ce soit celle liée à la température élevée de l’air ou celle associée à l’hospitalité de notre hôte. Sur la route, ce dernier nous explique qu’ici pas de COVID, il est resté sur le continent grâce au soleil perpétuel. Ah bon?! Par contre, il faudra être plus prudentes à Dar Es Salaam, où il y a quelques cas… Cela voudrait-il dire que la météo est moins clémente sur le reste du pays? Bizarre cette histoire… En tout cas, on remarque bien vite qu’ici, le masque est loin d’être obligatoire/recommandé/existant… Soit. On va s’adapter hein ;-)
Après plusieurs heures de repos, il est temps de… se restaurer bien sûr! On ne va pas perdre les bonnes habitudes quand même! Bon, il fait déjà nuit dehors, et on vous avoue qu’on est pas hyper hyper rassurées. On n’a absolument aucun repère dans ce nouveau pays dont on ne connaît ni les coutumes ni les mentalités, et dont on nous a souvent répété de nous méfier. Allez, on se lance et c’est parti pour notre premier choc culturel. Verdict: pas un regard insistant, zéro commentaire déplacé, aucune insistance de la part des vendeurs ambulants, mais que des “Jambo” (Bonjour) ou “Karibu” (Bienvenue) et de nombreux sourires. C’est ainsi rassurées que nous dégustons notre premier repas tanzanien.
Nous consacrons la matinée suivante à la visite de l’Old Slave Market, le musée principal de la ville qui comme son nom l’indique, retrace l’histoire de l’esclavage à Zanzibar. Si nous savions que l’île était à l’époque une plaque tournante de cette pratique, nous ne soupçonnions pas tant de complexité.
Nous apprenons ainsi que Zanzibar faisait office de plus grand marché aux esclaves en Afrique de l’Est aux XVIIIème et XIXème siècles. Des dizaines de milliers d’esclaves vivaient sur l’île ou y transitaient, jusqu’à représenter plus de deux tiers de la population locale. Parallèlement à l’ivoire, aux épices et au girofle, le commerce des esclaves était très lucratif et largement stimulé par les Européens, les Indiens, les Arabes, les populations côtières et les chefs ethniques du territoire continental. Les résidents de toute classe sociale bénéficiaient économiquement de l’esclavage, ce qui en faisait une partie intégrante de la culture d’Afrique de l’Est. Une fois leur liberté achetée, les anciens esclaves eux-mêmes s’en procuraient, symbole de richesse et de domination.
Les esclaves (souvent des familles entières) étaient kidnappés dans toute l’Afrique avant d’entamer un long et périlleux périple jusque Zanzibar. En bateau ou à pied, le voyage pouvait durer de quelques heures à plusieurs années… et beaucoup périssaient en cours de route (famine, maladies, attaques, etc.). On estime à 50 000 le nombre d’esclaves transitant par Zanzibar chaque année. Une fois sur l’île, les captifs étaient enfermés dans des cachots puis vendus aux enchères sur le marché de Stone Town. Examinés de la tête aux pieds (jusqu’à un examen des dents), leur prix variait en fonction de l’âge, du genre et d’éventuelles compétences. Les femmes destinées aux harems étaient les plus estimées tandis que les hommes passés la quarantaine étaient moins valorisés. Les plus faibles étaient vendus en lots…
Les rapport d’explorateurs relatant les conditions de vie des esclaves éveillèrent un sentiment anti-esclavagiste en Grande-Bretagne et contribua à la naissance de l’Eglise anglicane qui fit de l’esclavage l’un de ses combats principaux.
Ainsi ironiquement, le marché aux esclaves ferma en 1873 sous pression britannique, nation qui elle-même initia ce système 250 ans auparavant. De nombreux esclaves furent libérés. Pour autant, l’esclavage connu un vif regain, allant jusqu’à doubler. En effet, les traités britanniques visant l'abolition de cette pratique eurent pour conséquence de remplacer les revenus issus de la traite des noirs par les commerces légaux de l’ivoire (touches de piano et boules de billard), du sucre et du girofle. La demande en main d'œuvre explosa, obligeant les propriétaires de plantations à employer des esclaves, désormais vendus illégalement dans des maisons particulières, en plus de leurs travailleurs habituels.
A noter qu’il était également très difficile pour les esclaves de s’émanciper. Le plus souvent illettrés, ces derniers n’avaient pas conscience de leurs droits et aucune idée des démarches à effectuer (parfois une simple lettre) pour obtenir leur liberté. Découragés à la fois par leurs maîtres mais également par le gouvernement redoutant un désastre économique, beaucoup renonçaient à une vie libre qui ne leur assurait ni travail, ni toit, ni protection. L’esclavage sous cette forme perpétua ainsi plusieurs décennies avant de réellement diminuer.
Nous sommes d’autant plus choquées lorsque nous découvrons qu’à ce jour dans le monde, entre 21 et 36 millions de personnes sont toujours victimes d’esclavage dit moderne: mariage et travail forcés (femmes et enfants), traffic d’humains, servitude domestique, etc. Pire encore, les produits issus de ce néo-esclavage (coton, cacao, diamants…) entrent dans les chaînes logistiques mondiales pour attérir dans nos propres maisons (marques de textile, aliments, bijoux, produits éléctroniques, voitures…), laissant la plupart d’entre nous ignorants de notre contribution à cette pratique.
De quoi nous laisser pantoises quelque temps avant de reprendre nos esprits. Nous poursuivons la visite avec la cathédrale anglicane Christ Church, édifiée à l’endroit même où se tenait le marché aux esclaves.
Dernier élément et pas des moindres, un mémorial dédié aux victimes de l’esclavage. On y observe une sculpture représentant cinq esclaves de tous âges enchaînés par le cou avec des fers d’origine. Le monument est poignant et achève de décrire l’horreur des conditions.
Impossible de rester indifférentes devant tant de souffrance et d’injustice. Nous ressentons une décharge émotionnelle profonde mais nécessaire afin de mieux appréhender la région et son passé.
Outre son incontournable marché aux esclaves, la “ville de pierre” est également classée au patrimoine mondial de l’UNESCO pour son architecture à part. Nous nous perdons volontiers dans ses ruelles étroites et colorées qui font tout son charme.
Entre mosquées et églises, bâtiments coloniaux et portes en bois traditionnelles sculptées à la main, nous découvrons le mélange d’influences swahilis, britanniques, portugaises, omanaises et indiennes qui caractérisent la ville. Ici, les différentes cultures cohabitent parfaitement et donnent espoir...
Nous longeons ensuite le port à la recherche d’air frais. Nous apercevons ainsi le vieux fort, une citadelle construite en 1700 par les omanais pour se protéger de l’invasion portugaise.
Comme un rituel, nous ne manquons pas notre passage par le marché local qui pour nous reflète toujours l’atmosphère et l’âme de la ville qui l’abrite. Nous sommes émerveillées par toutes ces couleurs et les odeurs d’épices.
Après en avoir discuté avec Kalfan, ce dernier nous propose de l’y accompagner le soir même afin de goûter quelques spécialités. Nous acceptons avec plaisir, et c’est ainsi que nous nous retrouvons à déguster la fameuse Zanzibar Pizza accompagnée de jus de canne à sucre et gingembre et de fruits frais. Un délice!
Après trois jours dans la capitale de l’île, il est temps pour nous de poursuivre le voyage. Cap vers l’est et le village de Paje. Pour ce faire, nous empruntons le dala dala, transport commun des tanzaniens. Il s’agit ni plus ni moins d’un minivan (TRÈS rapide) pouvant accueillir jusqu’à 30 passagers malgré ses 20 places assises. Bien entendu, nous sommes les seules touristes à bord, ce qui rend notre expérience d’autant plus authentique.
Une heure de route plus tard, et nous sommes déposées à l’entrée de la ville. A l’origine un village de pêcheurs, Paje est encore préservé des touristes qui lui préfèrent le nord de l’archipel. Tant mieux pour nous! Nous rejoignons notre hébergement à pieds, avec l’impression d’être les seules voyageuses du coin. Même les vaches nous dévisagent!
Sur le chemin, les commerces locaux nous font gentiment sourire et donnent le ton des prochains jours, à l’image de la devise nationale: HAKUNA MATATA (tranquille, pas de soucis).
C’est d’ailleurs le nom de notre superbe guesthouse. Pour les petits curieux, nous procédons également de la même façon qu’en Asie, à savoir la réservation de notre séjour quelques jours avant notre arrivée. Mise à part une connexion Wifi souvent laborieuse, les infrastructures sont plus que correctes (chambres spacieuses, moustiquaire, eau chaude, petit déjeuner, etc.).
Nos sacs à peine défaits, nous ne résistons pas à l’envie de tremper nos pieds dans l’eau, à quelques mètres seulement de notre hébergement. Quel bonheur!
Histoire de bien terminer cette journée mouvementée, nous nous mettons en quête d’un endroit où manger. Et bizarrement, ce n’est pas chose si aisée. Nous sommes surprises de voir de nombreux hôtels et restaurants abandonnés. Les locaux nous confirment qu’avec la pandémie, un grand nombre d’établissements ont dû fermer, faute de clients… Nous n’irons pas jusqu’à qualifier Paje de village fantôme, mais dans quelques mois, qui sait?
Après un long moment d’hésitation, nous osons entrer dans un restaurant désert, pourtant très réputé sur internet. Ravi, le cuisinier nous tend la carte, trois fois plus chère que prévu. Nous lui faisons remarquer que les prix ont un tantinet explosé, ce à quoi il répond: hakuna matata, deux pour le prix d’un! C’est ainsi que nous reviendrons tous les jours déguster notre fameux Chicken Flake, du poulet et des légumes marinés dans une sauce épicée.
Le lendemain, c’est un paysage surréaliste que nous découvrons en nous réveillant. La mer s’est retirée à plusieurs centaines de mètres, laissant une vaste étendue de sable à nos pieds. Le soleil est tellement fort que nous sommes incapables de garder les yeux ouverts très longtemps.
Nous avançons un peu à tâtons, sans pour autant manquer le spectacle qui s’offre à nous. Le bleu océan de la veille a été remplacé par des nuances turquoises qui nous laissent sans voix. C’est limite si on ne perd pas la notion de la réalité, tellement ce décor nous rappelle les sources thermales islandaises, certaines plages des Philippines, voire une scène lunaire…
Il faut dire ce qui est, la chaleur accablante limite nos journées à une ou deux activités. Mieux vaut leur consacrer la matinée puis se reposer avant de rejoindre notre nouveau QG. A l’approche du restaurant, nous observons un attroupement coloré: une bonne centaine de personnes portant des t-shirts à l’effigie du président dansent et chantent en son honneur. Heureusement qu’il nous fallait éviter tout rassemblement politique en vue des prochaines élections…. Mais comment faire lorsque le rassemblement vient à nous? Pas d'inquiétude, la manifestation se déroule dans la joie et la bonne humeur.
Paje restant un village, il est vrai que nous en avons vite fait le tour. Nous jetons ainsi notre dévolu sur Jambiani à quelques kilomètres au sud, et c’est à pieds que nous décidons de rejoindre ce nouveau lieu d’intérêt. Aurions-nous préféré un bon vieux scooter pour nous perdre sur l’archipel? TOUT À FAIT. C’était d'ailleurs notre plan initial. Malheureusement sur place, nous nous rendons vite compte qu’il n’est pas si habituel de louer un deux-roues pour visiter l’île. Entre son prix exorbitant (7 fois celui d’Asie) et l’excès de zèle des policiers, nous sommes assez vite découragées d’emprunter ce moyen de locomotion. Nous voilà donc pieds-nus sur la plage en plein cagnard à effectuer les 7 kilomètres qui nous séparent de Jambiani (et non, le principe des activités dans la matinée ne fonctionne pas à tous les coups)
Sur le chemin, nous avons la chance de pouvoir nous approcher des cueilleuses d’algues, un travail difficile créé par les locales pour améliorer leur vie et leur indépendance et ainsi rééquilibrer l’égalité des chances entre les femmes et les hommes à Zanzibar. La plantation et la récolte des algues leur permet de créer des produits (shampoings, savons, dentifrices…), de gagner de l’argent et par conséquent de contribuer au bien-être de leur famille et de leur communauté. Nous nous sentons privilégiées de pouvoir les photographier.
Après 2 heures de marche, nous arrivons enfin à destination. Bon… à défaut de voir des paysages différents, cela nous aura au moins permis de faire de l’exercice.
Heureusement pour nous, les plages de l’île restent de vrais lieux de vie pour les locaux: lieux de travail des femmes, retour de pêche des hommes, et surtout un magnifique terrain de jeux pour les enfants.
Sur le retour, nous avons même la surprise de rencontrer plusieurs Maasaï. Ces derniers, originaires du nord du pays, viennent régulièrement à Zanzibar afin de vendre leur artisanat aux touristes. Ils proposent de nous raccompagner à Paje, ce qui nous permet d’échanger longuement sur nos modes de vie respectifs. Très fiers de leurs coutumes, ils n’échangeraient leur place pour rien au monde, et on se dit qu’ils ont bien raison. Nous rions lorsqu'ils nous font part de la peur ressentie lors de leur première rencontre avec une personne blanche, mais nous rigolons un peu moins lorsqu'ils tentent de m’acheter pour 1000 vaches. Par chance, Anouck négocie une girafe et deux lions, ce qu’ils ne peuvent pas nous procurer. C’est dans un esprit de partage et entourés de nos quatre imposants gardes du corps que nous regagnons notre guesthouse. Comme vous pouvez vous l’imaginer, nous sommes loin d’être passées inaperçues.
Nul doute, cette expérience a plus qu’éveillé notre curiosité pour notre future immersion en terre Maasaï prévue dans quelques semaines.
Pour notre dernière journée sur l’île, nous nous laissons tenter par le kitesurf. Discipline de plus en plus populaire, le kitesurf crée le lien entre les sports nautique et aérien. Et quoi de mieux que Zanzibar, l’un des spots les plus reconnus pour ce sport, pour s’essayer à cette activité? Nous apprenons ainsi à manier un kite de petite taille sur la plage avant de passer à la grande voile dans l’eau. Pas de planche pour cette fois (plusieurs heures supplémentaires requises), mais déjà de belles sensations!
Après une semaine sur l’archipel, il est temps de quitter Zanzibar pour le continent, où notre mission de volontariat nous attend.
Dar Es Salaam & Alentours (22/10 - 05/11)
L’espace de 15 jours, nous faisons partie intégrante de Chamazi, une communauté défavorisée où l’on vient en aide aux enfants dans l’apprentissage et les activités extra-scolaires. Pour en savoir plus, nous vous invitons à lire l’article consacré à cette expérience humanitaire inoubliable.
Les week-ends sont libres, et nous profitons du premier samedi pour nous rendre à l’ancienne capitale Dar Es Salaam, à environ 1h30 de dala dala. Nous débarquons au beau milieu du gigantesque marché Kariakoo, un incontournable que nous nous empressons pourtant de quitter. L’atmosphère est oppressante au possible, entre la chaleur étouffante, la pollution, le bruit excessif et la sollicitation systématique des vendeurs qui nous attrapent par le bras tout en nous chuchotant “sugar sugar” à l’oreille.
Tout le contraire du “Havre de Paix” rêvé à la lecture du nom de la plus grande ville du pays. Il nous faudra plus d’une heure pour nous extirper de ce labyrinthe. Malheureusement pour nous, la suite de la visite ne nous enchante pas davantage. Mis à part les techniques originales et amusantes de certains vendeurs ambulants, nous trouvons la ville vide de sens et sans grand intérêt.
Sans compter le trajet du retour, pile à l’heure de pointe! Soit plus de deux heures de dala dala surchargé nous rappelant vaguement le Sri Lanka…
Bref, on aura retenu la leçon: Dar Es Salaam on l’a vue, on l’a vécue et on n’y reviendra plus!
Depuis le temps que vous nous connaissez, vous avez intégré qu’une semaine sans aventure n’en est pas vraiment une… Et bien vous n’allez pas être déçus! Le weekend suivant, nous nous penchons un peu plus sur notre passeport et notre visa tanzanien. Ce dernier, bien que normalement valable pour trois mois, est rarement délivré par les autorités qui préfèrent inscrire un délai plus court sur le tampon, obligeant les voyageurs à se rendre dans les bureaux de l’immigration pour tenter de leur soutirer de l’argent. Vous vous en doutez, nous avons fait très attention à notre arrivée afin de nous éviter ce genre de désagréments. Du coup, nous sommes hyper soulagées lorsque nous ne remarquons aucune date d’expiration sur nos papiers. Et pourtant… Deux semaines passent tranquillement et nous voilà à revérifier nos passeports par acquit de conscience.
Ça y est? Vous la voyez arriver la galère hebdomadaire?
Par curiosité, vous lisez quoi sur notre visa? Parce que nous, on a mis plus de 30 minutes à réaliser!
Et oui, c’est bien “TWO WEEK” (mal orthographié c’est encore plus drôle) donc DEUX SEMAINES qui sont annotées sur nos passeports. Nous envisageons un moment de barrer le mot “WEEK” pour “MONTHS” mais nous demandons finalement conseil à Emmanuel chez qui nous logeons. Évidemment, il nous avise de nous rendre au plus vite au bureau de l’immigration. Petit rappel de contexte: nous sommes le vendredi 30 octobre 13H. Le bâtiment administratif, situé à plus de 40 minutes de route en voiture si tout va bien, ferme à 14H pour tout le weekend. Sachant que nous avons atterri le 15 octobre en Tanzanie, le calcul est vite fait: NOUS DEVONS NOUS MAGNER LES FESSES COMME JAMAIS!! 10 minutes de marche, et Emmanuel nous dégote une mototaxi, le moyen le plus rapide de parvenir à destination. C’est bien sûr à trois sur l’engin munies de nos casques inexistants que nous démarrons. Sur la route, le chauffeur ressent le besoin de se soulager, c’est bien le moment tiens!
Première mission accomplie, puisque nous arrivons 30 minutes plus tard. 30 minutes au cours desquelles nous avons bien failli mourir une bonne dizaine de fois. La conduite est comment dire… imprudente? inconsciente? extrême? Bref, de quoi bien nous stresser, comme si nous ne l’étions pas déjà assez! Ici, pas de code de la route, le but est d’avancer sans avoir à s’arrêter, quitte à emprunter le terre-plein, dépasser par la droite ou la gauche, déborder sur la voie opposée ou simplement slalomer entre les autres véhicules avec 5 cm de chaque côté. Vous nous excuserez de n’avoir pas plus immortalisé cette expérience, trop occupées à sauvegarder nos vies en suspens.
Il est 13h45 lorsque nous entrons dans le bureau d’immigration. Au guichet, on ne daigne à peine nous écouter et nous regarder, mais on ne manque pas de nous faire comprendre qu’il faut revenir avec un tas de papiers supplémentaires. Huit photocopies plus tard dans le magasin d’en face, et nous déposons à nouveau notre demande, en précisant que nous quittons le pays début décembre et qu’il nous faut remplacer les deux semaines de visa par deux mois. “No problem” qu’il nous dit. Nous prenons notre mal en patience et vers 15H30, nous récupérons nos passeports avec un nouveau visa D’UN MOIS. C’EST UNE PLAISANTERIE? Nouvelle date butoir: 29 novembre: va falloir sacrément revoir nos plans… C’est totalement vidées que nous quittons le bâtiment pour retrouver notre chauffeur et le trajet du retour qui nous attend. Etonnamment, nous rentrons en vie et en un seul morceau. A l’image de Dar Es Salaam, la mototaxi on l’a vue, on l’a vécue, et on ne recommencera plus!
Et puis parce qu’on en a jamais de trop, nous sommes également coupées du monde extérieur pendant plusieurs jours, le gouvernement ayant bloqué l’ensemble des réseaux sociaux (Whatsapp, Facebook, Messenger) et plusieurs applications le temps des élections.
Morogoro
(05/11 - 07/11)
Après deux semaines de volontariat, nous prenons la route vers la région montagneuse de Morogoro où un beau programme nous attend. Cinq heures de bus plus tard et un compagnon de voyage supplémentaire (notre ami canadien Ian qui fera un bout de route avec nous), et nous voilà tous les trois saucissonnés dans un tuk-tuk direction l’Oldonyo Mountain View. Comme son nom l’indique, cette guesthouse est située à flanc de montagne et surplombe toute la ville. Nous sommes accueillis par Fanny & Ibrahim (Ibra), un couple franco-Maasaï, et leurs deux enfants. Rencontrés lors d’un projet de solidarité à Zanzibar en 2013, ils décident de s’installer ensemble et développent le projet fou d’ouvrir une maison d’hôtes. Cette dernière voit le jour en 2018, après deux ans de travaux (sans électricité) et démarches administratives. Le résultat est à la hauteur des efforts fournis: une magnifique maison avec vue sur l’ensemble de la région et un spot idéal pour admirer le coucher du soleil.
Au cours du repas, Ibra prend plaisir à nous raconter l’une de ses histoires favorites: la première fois qu’il a pris l’avion. Nous saisissons l’occasion pour lui poser des questions sur les coutumes de son village qu’il visite autant que possible pour se ressourcer.
Le lendemain, nous nous équipons pour un trek au cœur des Monts Uluguru abritant certaines des plus anciennes forêts d’Afrique. Nous sommes attendus par notre guide Maasaï Samuel avec qui nous allons passer la journée. Dès les premières minutes de randonnée, nous sommes surpris par la biodiversité des alentours, tant au niveau de la faune que de la flore.
La marche est d’autant plus agréable que le climat est doux, ce qui est idéal pour l’agriculture vivement pratiquée dans la région.
Après 2h30 d’ascension, nous atteignons notre première destination pour déjeuner: le Morning Side. ll s’agit d’un ancien bâtiment datant de la colonisation Allemande, vieux de plus de 100 ans. Il n’est pas vraiment entretenu, mais l’intérêt d’y aller réside surtout dans la superbe vue panoramique que l’on a depuis le site, sur toute la ville de Morogoro et les terres agricoles des Monts Uluguru.
Dans l’après-midi, nous suivons de petits sentiers (parfois abruptes) et traversons de nombreux villages dans un décor impressionnant.
Nous profitons des Choma Waterfalls pour nous reposer un peu et rafraîchir nos pieds endoloris. La cascade est une belle surprise à laquelle nous ne nous attendions pas.
Après 7 heures de trek et des paysages à couper le souffle, il est temps de rentrer et de nous préparer pour une expérience mémorable: une immersion dans une tribu Maasaï.
Parakuyo Maasai Village
(07/11 - 08/11)
Dans la matinée, nous partons pour Parakuyo, le village Maasaï d’où est originaire Ibra. Nous prévoyons d’y passer avec lui le weekend afin d’en apprendre plus sur la culture de cette tribu réputée dans le monde entier. Les Maasaï sont un peuple de guerriers et d’éleveurs semi-nomades du Kenya et de la Tanzanie. Initialement nomades, ils ont pour habitude de migrer régulièrement et de circuler librement à travers la frontière en fonction des saisons et des ressources disponibles pour le bétail, leur plus grande richesse. Établis pour la plupart dans les grands parcs animaliers, le gouvernement tente cependant depuis plusieurs années de les délocaliser et de les sédentariser pour davantage développer les safaris et autres attractions touristiques. Ces tentatives se sont soldées par un appauvrissement de la population Maasaï, de nombreux jeunes guerriers préférant se tourner vers un style de vie occidental et des études supérieures. Désormais, les Maasaï essayent tant bien que mal de trouver leur place entre leur culture bien ancrée et les demandes imposées par un monde qui évolue. Chaque tribu est donc différente, malgré un mode de vie bien distinct du nôtre.
Nous nous sentons ainsi très privilégiées d’aller à la rencontre de cette ethnie ancestrale et de nous immerger dans leur environnement menacé. Après 1h30 de route depuis Morogoro, nous nous enfonçons dans le bush et découvrons le village de Parakuyo. Évidemment, nous sommes accueillis par de nombreux enfants ravis de pouvoir échanger avec des étrangers.
Le peuple Maasaï a conservé un mode de vie traditionnel en harmonie avec la nature leur permettant de vivre en (quasi) autosuffisance. Quasi, car comme indiqué plus haut, ils ont appris à composer avec les ingrédients, parfois imposés, parfois bienvenus, d’un monde moderne. Nous comprenons rapidement le fonctionnement du village de Parakuyo: un grand village (sous l’autorité d’un chef) réparti sur des dizaines de kilomètres, avec des bâtiments centraux en dur (église, magasin de première nécessité, école), et des ensembles d’habitations. Les Maasaï vivent ainsi en habitat dispersé dans ces mini-villages appelés bomas. Ils sont constitués de petites maisons construites à partir de branchages entrecroisés recouverts de bouse de vache et de boue séchées. Les cases sont généralement divisées en plusieurs pièces dédiées aux invités, à la cuisine, aux animaux, et à un espace nuit distinguable grâce à une peau de vache tirée sur une planche en bois.
Chaque boma représente une famille, composée d’un homme, de plusieurs femmes et de nombreux enfants. En effet, la polygamie tient une place importante dans la culture Maasaï. N’ayant pas le même rapport affectif que nous, il est inconcevable pour un guerrier Maasaï de n’avoir qu’une seule femme. Il est ainsi normal pour un homme d’avoir une dizaine de femmes (voire trente!) et une cinquantaine d’enfants!! En revanche, une femme ne peut se marier qu’une seule fois. Nous apprenons cependant que les relations extra-conjugales sont courantes (avec le beau-frère par exemple). Bref, on vous avoue que nos mentalités occidentales ont un peu du mal à s’y faire, surtout lorsque l’on voit les femmes détaler à l’arrivée de leur mari de peur d’être battues... Chaque case est réservée à une femme et ses enfants, le mari changeant d’habitation à sa guise. Le point positif, c’est qu’il n’y a aucune jalousie, les femmes encourageant même leur homme à multiplier les épouses pour avoir plus de copines et de soutien dans les tâches.
Les habitations sont généralement dépourvues d’eau et d’électricité, obligeant les Maasaï à s’implanter près d’un lac ou d’une rivière. Mais le gouvernement, dans son dessein de limiter ce nomadisme, implante désormais des panneaux solaires et systèmes de récupération d’eau dans le sol.
Dès notre arrivée, nous sommes mises à contribution dans la préparation du déjeuner: l’ugali national (une sorte de polenta à base de maïs) accompagné d’une sauce à base de tomates, pommes de terre et lait frais. Bien sûr, le tout se mange avec les mains.
Le peuple Maasaï se nourrit majoritairement de laitages et de sang, qu’ils peuvent prélever dans le cou des jeunes bovins sans les tuer. Le sang associé au lait constitue l’aliment de base (dieu merci, nous y avons échappé!). La viande est plus rarement consommée et davantage réservée aux occasions particulières.
Si les Maasaï ont tous la tête rasée pour une question d’entretien, hommes et femmes se parent de bijoux de la tête aux pieds, l’ornementation corporelle jouant un rôle essentiel dans leurs coutumes. Dès l’âge de 12 ans, les jeunes filles apprennent à enfiler les perles (colliers, bracelets, manchettes, ceintures) et à broder des vêtements multicolores.
Du coup, les enfants sont un peu perplexes devant nos cheveux longs et bijoux scintillants…
Ils sont également bien curieux de nos appareils électroniques et sont tout excités à l’idée de se découvrir à l’intérieur d’un étrange boîtier.
Mais ce qui les fascine le plus, c’est bien entendu notre peau blanche, qu’ils ne se lassent pas de toucher et de frotter.
Les Maasaï sont répartis en clans patrilinéaires et en classe d’âge: enfants, jeunes guerriers, guerriers adultes, jeunes aînés et aînés. Chaque passage d’une étape à une autre est accompagné de rites initiatiques: la circoncision pour les jeunes garçons, l’excision pour les jeunes filles (bien qu’illégale), le maniement des armes, des chants de guerres et danses traditionnelles, etc. Les plus jeunes sont très admiratifs des anciens et s’inclinent devant eux en guise de respect. Les aînés leur touchent alors la tête pour les saluer.
Lors de notre visite des bomas alentour, nous remarquons de nombreuses vaches et chèvres. Rien de surprenant, puisque la vie entière des Maasaï s’articule autour du bétail, leur principale source de nourriture (lait et viande) et de richesse (afin d’assurer un petit revenu ainsi qu’en tant que dot lors du mariage). Le prestige d’un Maasaï se mesure à la taille de son troupeau. Sans son bétail, il n’est rien.
Les hommes emmènent le matin leurs troupeaux paître pour la journée (parfois plusieurs jours) et rentrent au village au coucher du soleil pour permettre aux femmes de les traire et éventuellement de les soigner.
De ce fait, il est vrai que nous n’avons pas vu beaucoup d’hommes Maasaï au cours de notre immersion. Au contraire, nous sommes restées bouche bée devant la quantité de travail abattu par les femmes. Ces dernières sont responsables de la construction des cases, de la recherche de l’eau et du bois, de la fabrication des bijoux, de la création des vêtements, de l'éducation des enfants, de la cuisine, de l’entretien du village, et des animaux sur place. Au-delà du bétail, les hommes sont quant à eux chargés d’aller au marché et de veiller à la sécurité du boma. La tâche la plus difficile revient quand même aux anciens: commérer à l’ombre de l’arbre toute la journée. Vous l’aurez compris, l’égalité entre hommes et femmes chez les Maasaï est bien loin de ce que l’on connaît.
Filles comme garçons, les enfants sont également mis à contribution très jeunes.
Chaque individu de la tribu a une place bien définie et sait ce qu’il à faire. C’est donc naturellement que nous nous attelons toutes ensemble à l’élaboration du dîner. Tri de grains de riz en perspective et cuisson au feu de bois dans une atmosphère extrêmement chaleureuse. On ressent un véritable esprit de collectivité et on se sent tellement les bienvenues par ces dames que ça nous réchauffe le cœur.
C’est à la lampe frontale (une révolution pour eux) que nous dégustons notre délicieux repas.
Vient ensuite l’heure de se décrasser. Un seau d’eau froide derrière la case et le tour est joué. Pour les toilettes, c’est dans le bush, mais pas trop loin car on préférerait éviter de se retrouver nez à nez avec une hyène ou un lion. Bien rafraîchies, il est temps de découvrir notre petit nid! Niveau sécurité, pas d’inquiétude, l’entrée est bien gardée!
Qu’on se le dise, la nuit est rude. Entre le matelas inexistant, la chaleur étouffante, la douzaine de poules sous notre lit et les bruits d’animaux incessants, nous fermons à peine l'œil.
Nous sommes presque ravis lorsque nous sortons du lit à 6h du matin. Et quoi de mieux qu’une attaque de poulets pour bien commencer la journée?
Après le petit-déjeuner, nous passons un peu de temps avec les enfants. Un rien les amuse, et nous prenons plaisir à partager ces moments avec eux.
Anouck se découvre également une nouvelle passion pour les chèvres.
Nous sommes ensuite invitées aux célébrations dominicales. On ne rechigne pas lorsque les femmes nous proposent de nous vêtir en Maasai, heureuses de pouvoir les rendre fières et leur montrer que nous souhaitons nous adapter. Bon, il faut avouer qu’on s’est déjà senties plus nous-mêmes dans d’autres vêtements, mais c’est l’occasion de bien rigoler!
Nous nous rendons à l’église du village et assistons à la messe hebdomadaire. Entre sermons du pasteur, chants et danses, nous découvrons une manière différente et un peu plus joviale de prier.
Nous terminons par une poignée de mains avec l’ENSEMBLE des participants. Pile de circonstance en ces temps de pandémie et de confinement…
Après un jour et demi d’immersion très intense, notre expérience touche à sa fin. Ce n’est pas sans émotions que nous faisons nos adieux au village et à ses habitants. Et s’il est vrai que nous ne partageons pas toujours les mêmes convictions, nous gardons un souvenir indélébile de notre séjour Maasaï, entre responsabilités et insouciance, liberté et gravité, mais toujours empreint de simplicité et d’authenticité.
Kigoma & Parc National de Gombe
(08/11 - 15/11)
Nous peinons à nous remettre de cette évasion hors du temps et pourtant, il est déjà l’heure de passer à la prochaine aventure. A la lecture des nombreux commentaires de voyageurs, nous savons déjà qu’elle ne sera pas de tout repos. Notre objectif est le suivant: rejoindre Kigoma, à la frontière avec la République Démocratique du Congo, en train. Soit 1060 kilomètres en 35 heures de voyage. Mieux vaut pourtant prévoir le double, les retards et pannes étant fréquents. Ça promet non?
Après 1 heure de négociations avec le chef de gare et plusieurs échanges téléphoniques, nous parvenons enfin à réserver nos tickets en première classe (cabine 2 couchettes) pour le dimanche soir. Juste le temps de prendre une bonne douche et un bon repas après notre immersion Maasaï avant de rejoindre le quai et déjà la centaine de passagers sur place.
Evidemment, le train arrive avec 2h30 de retard, et c’est donc à quasi minuit que nous rejoignons nos nouveaux quartiers… déjà occupés!
Il faudra 30 minutes de plus pour qu’un responsable nous libère nos places et que l’on puisse s’installer. C’est sûr, niveau propreté et sécurité, on a connu mieux! Les bouts de bois servent à bloquer les fenêtres pour éviter toute intrusion nocturne, le lavabo est infesté de cafards et le ventilo ne fonctionne pas. Un régal!
Le bruit est tout simplement assourdissant, et on comprend bien vite que cela va être difficile de trouver le sommeil (pour ne pas changer).
On apprécie particulièrement le moment où le train doit raccrocher des wagons, entraînant une bonne dizaine de collisions et au passage l’assommade d’Anouck qui se brossait les dents. Plus de peur que de mal!
Heureusement, le reste du voyage se passe sans encombre, et nous ne regrettons pas de vivre cette étape comme les locaux.
Nous profitons des paysages et sommes surprises par tant de diversité!
Nos moments préférés restent quand même les arrêts sur la voie au cours desquels de nombreux vendeurs viennent à la fenêtre pour faire affaire. On ne se lasse pas de leur réaction à la vue de trois étrangers et de leurs “MZUNGUS MZUNGUS” (personnes blanches) ébahis en nous pointant du doigt.
Après 37 heures de voyage, nous arrivons enfin à destination, et même si nous sommes ravies de cette expérience, nous sommes impatientes de pouvoir récupérer convenablement des derniers jours dans un vrai lit après une douche bien chaude!
S’il est vrai que nous ne nous éternisons pas dans la visite de Kigoma, la région a pourtant de quoi surprendre. Entourée de montagnes, elle abrite de nombreux villages de pêcheurs puisqu’elle est située sur les rives du lac Tanganyika, le plus grand lac d’eau douce au monde et le deuxième en termes de profondeur.
Nous concernant, nous sommes accaparés par l’organisation de notre excursion vers le Parc National de Gombe, berceau d’une grande partie des recherches de la primatologue Jane Goodall dans les années 1960 concernant le comportement des chimpanzés. Situé à 16 kilomètres de Kigoma, le parc est uniquement accessible par bateau et nécessite donc quelques préparatifs en amont. Dire que nous sommes excités est un euphémisme!
Un jour de logistique plus tard, et nous voilà à bord de notre bateau. Direction le Parc National de Gombe et sa centaine de chimpanzés.
Au cours des deux heures de traversée, nous apercevons plusieurs habitations isolées et des pêcheurs en pleine action. On se demande comment ils font pour ne pas chavirer dans de si petites embarcations!
A mesure que nous nous rapprochons de notre destination, la végétation devient plus luxuriante et les babouins se font plus nombreux sur le rivage du lac.
En fin de matinée, nous atteignons enfin notre objectif.
Nous avons juste le temps de nous installer et d’avaler notre déjeuner qu’il est déjà l’heure de rencontrer nos guides pour la journée. Ces derniers nous expliquent que le parc animalier sert d’habitat à une faune très diversifiée, dont de nombreux primates comme les babouins, colobes, singes bleus et bien sûr les chimpanzés qui font encore aujourd’hui toujours l’objet de recherches approfondies. Après avoir assimilé les règles de bonne conduite (masque obligatoire et contact interdit pour éviter toute transmission mutuelle de maladies, limitation d’une heure d'observation pour ne pas les déranger), nous partons à leur recherche.
Cela fait environ 1h30 que nous randonnons lorsque notre trackeur communique par talkie-walkie la position d’un groupe de chimpanzés à nos guides. Nous sommes tout près! Quelques minutes plus tard, et nous les découvrons enfin. Sous nos yeux, une vingtaine de chimpanzés.
Apparemment, c’est l’heure du repas: entre feuillages, fruits divers et insectes, les primates ont l’air de se régaler!
A l’image de Jane Goodall plus tôt, nous découvrons avec émerveillement la capacité des chimpanzés à fabriquer des outils pour se nourrir. Ils commencent par effeuiller une brindille d’une certaine taille qu’ils introduisent ensuite dans la termitière. Après un moment, ils retirent la petite branche sur laquelle sont suspendues plusieurs termites qu’ils s’empressent de déguster.
Nous apprenons également qu’ils peuvent casser des noix à l’aide de pierres soigneusement choisies et qu’ils sont habitués à chasser. Leur pouce opposable leur permet de saisir des objets et d’utiliser les outils.
Au bout de plusieurs minutes, le groupe semble en avoir assez et décide de se déplacer. Les chimpanzés vivent en effet en communautés (jusqu’à 100 individus). La journée, il se séparent en plus petits groupes pour aller chercher à manger dans la forêt puis se rejoignent le soir pour la nuit.
Nous suivons le groupe et tentons de maintenir l’allure. Pas évident, car ils sont très agiles et avancent rapidement tandis que nous devons nous frayer un chemin dans la jungle (vous vous doutez bien que les chimpanzés n’empruntent pas le sentier!).
Nous arrivons sur une seconde termitière, où les chimpanzés réitèrent leur activité préférée. Certains vont même jusqu’à tendre l’oreille afin de mieux localiser les insectes.
Nous sommes assez impressionnées par le calme et la concentration dont ils font preuve afin de parvenir à leurs fins.
Nous remarquons également à quel point la transmission du savoir d’un chimpanzé à un autre se fait aisément. Tout le groupe peut participer à l’éducation des petits. Ces derniers observent les plus grands faire et reproduisent l’exercice. Après plusieurs essais, ils y arrivent sans problème!
Mais pas trop longtemps, car il ne faudrait pas oublier de s’amuser! Les petits chimpanzés jouent beaucoup: ils se chatouillent, se battent gentiment et font même des parties de cache-cache (oui oui!).
Ce chimpanzé a l’air bien rêveur. Si nous ne pouvons pas connaître avec exactitude son nombre d’années, nous devinons assez facilement de par sa barbe grise son âge avancé.
Nous terminons notre heure d’observation avec une maman et son petit très complices.
Nous rentrons sur le camp très satisfaits, sans nous douter que la journée était loin d’être achevée... Après la plus frigorifique des douches tanzaniennes, nous sommes tranquillement allongées dans notre chambre à trier nos derniers clichés lorsque notre porte s’ouvre soudainement. Nous nous risquons à un “Hello”, croyant à l’erreur d’un employé. Que nenni! Je découvre avec effroi un babouin au pied du lit. Il faut quelques secondes à Anouck pour me croire, juste le temps pour qu’un énorme babouin mâle s’introduise à son tour dans la chambre. Nous sommes autant choquées qu’eux de nous retrouver face à face. Ni une ni deux, nous grimpons sur le lit et utilisons une couverture comme bouclier, sans avoir la moindre idée de comment nous comporter. Les singes font en revanche comme chez eux: ils inspectent toutes nos affaires qu’ils jettent au sol lorsqu'elles ne les intéressent pas. Seule notre trousse qu’ils brandissent comme une arme semble piquer leur curiosité. Nous appelons à l’aide sans crier de peur de les énerver. Anouck est amusée alors que je suis totalement pétrifiée. C’est seulement au bout de longues minutes qu’un gardien vient à notre secours et chasse les babouins avec un balai, sans manquer de nous rappeler qu’il faut bien fermer nos quartiers A CLEF. Pas d’inquiétude, on s’en souviendra! Trop bouleversées par cette irruption intempestive, nous n’avons pas eu le réflexe de capturer ce moment mémorable, mais nous vous partageons avec émoi la photo d’un babouin ressemblant étrangement à notre cambrioleur.
Nous reprenons tant bien que mal nos esprits devant un magnifique coucher de soleil sur le lac Tanganyika.
Après une bonne nuit de sommeil (et trois tours de clef), nous repartons en trek pour la matinée. Cette fois, il ne nous faut pas plus d’une demi-heure pour apercevoir nos premiers chimpanzés. Ces derniers sont confortablement installés sur leurs nids en hauteur qu’ils confectionnent tous les soirs pour la nuit et pour se protéger des prédateurs et de la pluie.
Nous assistons ensuite à un véritable concert indiquant qu’il est temps pour eux de se mettre en route. Les chimpanzés communiquent en effet entre eux à distance et échangent ainsi des informations à travers des cris plus ou moins stridents.
Trop rapides pour nous, nous suivons une maman et son petit qui avancent un peu au ralenti. Une femelle donne naissance à un petit (parfois des jumeaux) après 8,5 mois de gestation. Elle le transporte suspendu à son ventre pendant environ 6 mois jusqu’à ce que le bébé gagne en mobilité. Le petit se déplace ensuite sur son dos jusqu’à l’âge de 4 ans.
L’allaitement se prolongeant pendant toute cette période, les bébés chimpanzés restent le plus souvent collés à leur mère. Même après leur adolescence (vers 10 ans) et le passage à l’âge adulte (12 à 15 ans), les chimpanzés conservent des liens très forts avec leur mère.
La maman et son petit nous mènent à un énorme arbre, probablement un point de rencontre entre primates, puisque nous voyons débarquer une vingtaine d’autres chimpanzés. Ça crie, ça se balance, ça saute de branche à branche, jusqu’à ce qu’Anouck s’en prenne une sur la tête!
On reste prudentes et on n’oublie pas qu’un chimpanzé reste un animal sauvage et potentiellement dangereux, avec trois à cinq fois la force d’un humain!
Puis c’est le calme et la séance d’épouillage, pratique très répandue chez les singes. Au-delà d'ôter de petits parasites, cette activité représente une marque d’affection et de réconfort.
Nous terminons notre trek tout en douceur avant de regagner le camp.
Nous sommes à peine rentrés que la pluie s’invite à la fête, nous obligeant à rejoindre le bateau à la hâte pour reprendre la route vers Kigoma. Sur le retour, nous avons du mal à croire que ces animaux si proches de nous (ils partagent 98% de nos gènes!) sont en danger. Entre le commerce de viande de brousse et d’animaux de compagnie, la déforestation et les maladies, les chimpanzés sont aujourd’hui en voie d’extinction. Leur reproduction lente (en moyenne quatre enfants par femelle) les rend d’autant plus vulnérables à toutes ces menaces. Les singes jouent pourtant un rôle essentiel dans la protection de notre écosystème (consommation de fruits et déplacements importants contribuant à la régénération des forêts, durée de vie de 50 ans).
Protégeons-les!
Le ciel se couvre et notre virée sur le lac se transforme en véritable course contre la montre pour éviter l’orage. Nous finissons à égalité, puisque le déluge s’abat sur nous aussitôt le pied posé à terre. Quelle aventure!
Arusha, Safari & Mont Meru
(15/11 - 29/11)
Le lendemain matin, nous enchaînons avec un bus de 20 HEURES pour Arusha au nord du pays. Contrairement à l’Asie, les trajets de nuit sont interdits ici, nous faisant perdre beaucoup de temps dans les transports qui du coup paraissent plus longs. A notre grand étonnement, nous arrivons à destination entières et presque à l’heure! La ville d’Arusha n’a en soi pas grand intérêt, si ce n’est sa localisation avantageuse à mi-chemin entre les parcs nationaux consacrés aux safaris et les treks en montagne. Heureusement, quelques échoppes nous font bien sourire au milieu des nombreuses sollicitations des tours opérateurs postés à chaque coin de rue.
Nous parvenons ainsi à organiser notre safari sans grande difficulté. Nous jetons notre dévolu sur un combiné 3 jours/3 nuits dans les réputés parcs du Serengeti et Ngorongoro. Afin de nous mettre dans l’ambiance, nous passons notre première nuit au bord du Lac Manyara dans un cadre plus sauvage.
Nous prenons la route le lendemain matin vers les réserves animalières. Le temps est catastrophique, et on se demande un moment si notre bonne étoile ne nous a pas lâchées. Heureusement, après trois heures de trajet sous une pluie battante, le soleil pointe son nez à l’entrée du parc, comme un signe de bienvenue.
Nous voilà dans le Parc National du Serengeti, autrement dit le paradis du safari. En effet, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, le Serengeti abrite plus de trois millions d’animaux et s’étend sur plus de 15000km², d’où son nom d’origine Maasaï signifiant “plaine sans fin”. On comprend vite pourquoi…
De suite, nous sommes téléportés dans un reportage animalier au milieu de centaines de zèbres, gnous et autres antilopes. Nous assistons en fait à la grande migration, le plus impressionnant des spectacles offerts par la nature et qui fait toute la renommée du parc. Chaque année à la même période, d’interminables troupeaux d’herbivores (dont deux millions de gnous et 500000 zèbres!) se déplacent sur plusieurs milliers de kilomètres à la recherche de nouveaux pâturages et points d’eau. Considérée comme l’une des sept merveilles d’Afrique, la grande migration ne connaît pas de frontière et représente le plus grand phénomène migratoire au monde!
Les belles surprises s’enchaînent et nous tombons nez-à-nez avec une girafe. Nous sommes émerveillées, tant par sa grandeur (4 à 6 mètres) que par sa démarche qui donne l’impression d’un film au ralenti.
Puis c’est l’heure de la horde de hyènes. Nous semblons les interrompre en pleine sieste, ou plutôt en pleine digestion à en croire le bon morceau de zèbre qui trône au centre de leur cercle.
La chance est clairement de notre côté car quelques kilomètres plus loin, nous nous extasions devant six lionnes et un lion se reposant tranquillement. Le mâle se fait timide mais nous parvenons à immortaliser les félines facilement.
Et comme si on n’en avait pas assez pris plein les yeux, nous apercevons en fin de journée deux guépards. Avec une vitesse de pointe à 110km/h, il s’agit de l’animal terrestre le plus rapide du monde. Malheureusement pas assez rapide pour échapper à l’homme puisqu’il est menacé d’extinction. Quelle allure!
Outre les animaux sauvages, un safari est également synonyme d’aventure dans un environnement époustouflant. Le Serengeti n'échappe pas à la règle et offre une grande diversité de paysages épatants!
Pour la nuit, c’est CAMPING! Anouck est ravie, moi un peu moins, surtout lorsque l’on nous annonce que le camp n’est pas protégé et qu’il est courant que lions et hyènes rôdent le soir entre les tentes. On préfère ne pas y penser pour l’instant et profiter de la soirée.
Bizarrement, la motivation d’Anouck en prend un coup à la vue des milliers d’insectes dans les sanitaires! Elle préfère le bush, et tant pis pour les prédateurs!
En parlant de prédateurs, nous avons bien entendu les hyènes ricaneuses à la tombée de la nuit, sans parler du lion qui nous a rendu visite à 2h30 du matin! Avec ses boules Quies, Anouck n’a (encore) pas voulu me croire, et il a fallu la confirmation de notre chauffeur le lendemain pour la convaincre. Croyez-moi, un ronronnement pareil à quelques centimètres ça ne s’oublie pas, et on se retient sans problème pour aller aux toilettes! D’ailleurs, n’est-ce pas un marabout d’Afrique que nous distinguons en nous brossant les dents?
Départ matinal pour notre “game drive” (safari en jeep) à 7 heures, les animaux étant plus susceptibles d’être observés avant les grandes chaleurs de la journée. Pari gagnant, puisque nous rencontrons rapidement zèbres, impalas, buffalos, singes et gazelles, entre autres.
Une odeur nauséabonde nous annonce ensuite la proximité d’hippopotames, et c’est en effet des dizaines de mammifères que nous voyons se prélasser dans une eau boueuse. Bien qu’ils soient herbivores et adeptes des séances jacuzzi, mieux vaut se méfier de cet animal imprévisible et agressif responsable de nombreuses attaques en Afrique.
Nous avons à peine le temps de tourner la tête qu’une nouvelle horde de hyènes se déplace à quelques mètres de nous. On pourrait presque les caresser si elles n’étaient pas aussi repoussantes!
Nous passons notre dernière heure de jeu de piste au milieu d’un cortège de gnous migrateurs. Le décor est incroyable et a un peu des airs de Jurassic Park! Quelle chance nous avons d’être témoins de ce phénomène unique au monde!
L’absence de félins et d’éléphants nous laisse un peu sur notre faim, mais nous ne perdons pas espoir pour la suite du safari. Pour l’instant, nous préférons nous reconvertir en apprenties mécanos afin de changer la roue complètement à plat de notre jeep en pleine savane. Manquerait plus que les lions s’invitent à la fête tiens!
Le Serengeti, c’est fini, et on regrette peut-être de ne pas y avoir passé plus de temps. Mais budget limité oblige, nous devons faire des choix et c’est ainsi que nous nous dirigeons vers la seconde réserve animalière la plus prisée du pays: la Zone de Conservation du Ngorongoro. Le trajet nous offre à nouveau de magnifiques panoramas.
Nous croisons également de nombreux villages Maasaï qui nous rappellent notre immersion au sein de leur communauté. Contrairement au Serengeti d’où ils ont été expulsés, les Maasaï sont autorisés à rester sur leurs terres ancestrales du Ngorongoro à condition qu’ils conservent leur mode de vie traditionnel.
La végétation change à mesure que nous nous rapprochons de notre destination, et nous avons même le loisir d’observer plusieurs girafes en pleine dégustation.
Clou du spectacle à quelques minutes de l’arrivée: un gigantesque éléphants d’une cinquantaine d’années (d’après notre guide) avec ses deux impressionnantes défenses. Nous sommes tout simplement subjuguées.
C’est donc toutes excitées et totalement remotivées que nous atteignons notre second camp. Et quel emplacement! Au-delà de la douche chaude plus qu’appréciable, nous plantons la tente dans un cadre paisible et relaxant.
Cette fois, Anouck ne prend pas le risque de manquer des visiteurs nocturnes et ne passe pas à côté des zèbres qui viennent pâturer à quelques mètres. Plus sauvage, tu meurs!
Nouveau réveil matinal pour un game drive dans le spectaculaire cratère du Ngorongoro, autre merveille du continent. Il s’agit de la plus grande caldeira intacte du monde et on y trouve la plus grande concentration d’animaux sauvages d’Afrique. De bonne augure pour la journée!
Après plus de 600m de descente, nous atteignons le fond du cratère et remarquons immédiatement la richesse de l’écosystème environnant. Les animaux ont l’air moins craintifs, car plus habitués aux humains du fait de la présence Maasaï, et se laissent approcher de très près.
Nous approchons la lisière d’un bois et discernons à contre-jour deux buffalos massifs sur le bas-côté. Le guide nous apprend alors que le buffle africain représente l’animal le plus dangereux du continent! Ils ont pourtant l’air si calmes…
Changement de décor et nous voilà propulsées dans une petite forêt tropicale. Surprise, un éléphant nous précède de peu, nous barrant la route de toute son ampleur.
Nous le suivons des yeux pendant quelques secondes jusqu’à réaliser qu’il rejoint son troupeau constitué d’au moins CINQUANTE autres pachydermes. Les photos se passent de commentaires.
Apparemment, c’est la journée des éléphants, puisqu’à peine nous les quittons que nous rencontrons un autre troupeau de la même envergure! Nous qui redoutions de ne pas voir l’un des animaux les plus emblématiques d’Afrique, nous voilà servies, à notre plus grand bonheur!
Nous délaissons les bois pour retrouver la prairie et sa faune sauvage: oiseaux, autruches, buffalos, hippopotames, renards, hyènes et phacochères.
Encore une fois, les paysages ne nous laissent pas indifférentes.
Nous décidons d’ailleurs de nous arrêter à proximité d’un beau plan d’eau, histoire de profiter des derniers moments.
Sur le retour, nous apercevons de loin un rhinocéros camouflé dans les hautes herbes. Et même s’il nous est impossible de le photographier, nous nous sentons privilégiées de pouvoir observer cette espèce en danger. Après 4 heures de piste, l’aventure safari se finit, et s’il est vrai que nous nous attentions à encore plus d’animaux (félins en particulier), nous restons ravies de cette expérience absolument incontournable du continent et du pays.
Ne croyez pas qu’un safari est de tout repos. Entre les temps de transport importants, le bruit et les secousses permanentes de la jeep, et les nuits absolument pas reposantes, il nous faut un jour complet pour récupérer. Juste ce qu’il faut pour nous préparer à notre prochaine expédition et pas des moindres, l’ascension du Mont Meru.
La Tanzanie possédant de nombreuses chaînes de montagne, nous n’imaginions pas notre découverte du pays sans une ascension de l’un de ses sommets. Si le Kilimandjaro culminant à 5895m nous a beaucoup fait hésiter, nous avons finalement écarté la plus haute montagne d’Afrique au profit de son petit frère le Mont Meru à 4566m.
Pour ce faire, nous sommes accompagnées d’une équipe de choc de SD Safaris: notre guide expérimenté Hassan, notre cuisinier Johnny, ainsi que nos trois porteurs Salim, Bilal et Christopher. Nous avons un peu du mal à comprendre la nécessité d’autant de porteurs, mais en plus de transférer les affaires des clients, nous apprenons qu’ils doivent également transporter les sacs de couchage, la nourriture, le réchaud et la bouteille de gaz (oui oui!). Du coup, on essaie de minimiser au maximum nos affaires pour éviter de trop les charger.
Une fois nos paquetages préparés, notre équipe vient nous chercher, direction le parc national d’Arusha et la Momella Gate, le point de départ de l’ascension. Nous y récupérons notre ranger Ozi et démarrons sans attendre.
Le trek s’effectue sur trois jours et deux nuits et se répartit comme suit:
JOUR 1: Momella Gate (1500m) - Miriakamba Hut (2500m)
La première partie de l’ascension a plutôt des allures de safari à pieds (et ce n’est pas pour nous déplaire) car nous avons la chance de croiser plusieurs antilopes, buffles, zèbres, singes (columbus, bleus, babouins), sans oublier un tête-à-tête avec une girafe solitaire!
Nous traversons ensuite de nombreuses forêts, avec l’impression d’avoir intégré Le Livre de la Jungle.
Le plus impressionnant reste le Fig Tree Arch, un gigantesque figuier étrangleur naturellement façonné en une voûte capable de laisser passer les véhicules.
Nous suivons toujours de près notre ranger Ozi, surtout lorsqu’il nous annonce notre arrivée en territoire des pythons ou encore lorsqu’il repère deux buffalos prêts à nous attaquer, nous obligeant à dévier de notre trajectoire.
Les points de vue se multiplient et nous donnent un bel aperçu sur la région d’Arusha et son parc national.
Après 4h30 de randonnée, nous arrivons à notre premier camp situé à 2500m d’altitude. Nous sommes assez surprises par le confort du refuge: chambres avec lits superposés, sanitaires (à l’eau froide bien sûr) et salle à manger.
Nous ne manquons pas notre premier coucher de soleil en montagne et ses couleurs orangées, tout en tentant de discerner le Kilimandjaro habitué à se cacher.
Avant de nous coucher, notre ranger appelle à la prudence et nous prévient de la visite récurrente de léopards sur le camp, à croire qu’il est impossible de passer une nuit sereine en Tanzanie!
Bilan de cette première journée très positif, même si on a du mal à comprendre l’intérêt de notre guide puisque c’est le ranger qui mène la danse. Les jambes et les pieds tiennent le coup, la tête aussi, et on se dit que jusqu’à maintenant, on ne se débrouille pas si mal! Pourvu que ça dure...
JOUR 2: Miriakamba Hut (2500m) - Saddle Hut (3500m) et acclimatation au Little Meru (3820m)
Départ à 8h du matin au-dessus des nuages avec pour toile de fond le Mont Kilimandjaro, cette fois bien dégagé. On a du mal à croire qu’à cette heure-ci, d’autres trekkeurs sont parvenus à son sommet!
La végétation change rapidement, et la forêt laisse place à une garrigue digne de Provence, l’altitude en plus.
Nous arrivons au second camp sans trop de difficulté après 4h de montée.
Mais à peine restaurées et un peu reposées qu’il nous faut rechausser nos baskets de randonnée. Direction le Little Meru à 3820m pour s’acclimater.
45 minutes plus tard, et nous atteignons notre objectif et sa vue extraordinaire à 360°. C’est à ce moment que nous réalisons vraiment ce qui nous attend…
Nous redescendons rapidement jusqu’au camp pour une douche plus que sommaire et un dîner hâtif. Au passage, nous ne nous lassons pas d’un dernier coucher de soleil (un peu plus frisquet il faut l’avouer) en hauteur.
Il est un peu moins de 20h lorsque nous nous couchons, bien décidées à récupérer au maximum avant le réveil prévu dans 4 HEURES!!
Seconde journée relativement aisée donc, mais on comprend bien que l’accumulation des kilomètres et du manque de sommeil va clairement se faire ressentir. Affaire à suivre...
JOUR 3: Suddle Hut (3500m) - Mont Meru (4566m) & redescente à la Momella Gate (1500m)
Minuit, le réveil sonne, et là ça fait mal, très mal! Il fait nuit noire, très froid, les jambes sont lourdes et les paupières encore plus! Nous nous consolons un peu avec du thé et des biscuits, puis prenons la route pour le sommet.
Pour cette ultime étape, pas de ranger, et on saisit forcément mieux l’utilité de notre guide qui ouvre la marche et donne le rythme. Nous sommes également encadrées par nos porteurs Salim et Bilal afin d’assurer notre sécurité. Petit conseil: ne vous emmitouflez pas de vos cinq couches de vêtements dès le départ, on crève vite de chaud!
A la lumière de nos lampes frontales, nous suivons le sentier de brousse et atteignons sans encombre le Rhino Point à 3800m.
Jusque là tout va bien, jusque là… Le trek se corse soudainement et se transforme en falaise qu’il nous faut contourner à l’aide de chaînes. Heureusement que nos porteurs sont là pour nous rassurer, mais à quasi 4000m dans le noir et le précipice à quelques centimètres, croyez-nous, on ne fait pas les malines! Fallait nous dire de ramener les baudriers!
La suite de l’ascension s’effectue sur un terrain volcanique entre cendres et roches pendant plus de trois heures. C’est là que l’altitude commence à se faire sentir. Entre le froid, la fatigue et des pauses très espacées pour éviter de geler sur place, nos réserves physiques s’amenuisent dangereusement. A tel point que nous commençons à tituber et devons prendre quelques minutes pour nous reposer. Au bord de l’évanouissement, le thé chaud au gingembre préparé par notre équipe est le bienvenu, tout comme nos comprimés de dextrose qui nous remettent un peu d’aplomb. Mais c’est surtout la vision du soleil qui pointe le bout de son nez, synonyme de quasi arrivée, qui nous redonne du baume au cœur.
Quasi arrivée tu parles! Nous pensons en avoir presque fini quand nous butons devant un mur de pierres de plusieurs dizaines de mètres de haut à escalader. Et c’est donc avec le drapeau tanzanien en ligne de mire, les dents serrées et les yeux humides que nous atteignons péniblement le sommet. C’EST FAIT! Voici le Mont Meru, 4566 mètres, deuxième montagne la plus haute du pays et cinquième d’Afrique.
C’est émues que nous réalisons notre exploit et contemplons le lever de soleil sur le Kilimandjaro qui nous fait face.
Le temps est comme suspendu, et nous mesurons peu à peu la force de la nature et des éléments.
Nous restons une trentaine de minutes au sommet, juste ce qu’il faut pour profiter de ce moment inoubliable et l’immortaliser en compagnie de nos plus fidèles supporters.
Et si nous redoutions l’ascension, sachez que nous avons clairement sous-estimé la descente! Les jambes tremblent, les genoux souffrent, le soleil tape, bref, c’est interminable. Mais sur le coup, on comprend totalement pourquoi la montée se fait de nuit: outre la température moins élevée, PERSONNE ne pourrait gravir le Mont Meru en étant pleinement conscient du danger et du dénivelé parfaitement visible en pleine journée.
Au final, il nous faudra un peu plus de trois heures (contre deux de prévues) pour atteindre la Suddle Hut. Une petite heure, le temps d’avaler une soupe et de préparer nos affaires, et il est déjà temps de repartir vers le premier camp, soit trois nouvelles heures de descente. C’est épuisées et à bout de force que nous y parvenons. Le reste du trajet s’effectue en jeep jusqu’à Arusha, où nous remercions chaleureusement l’ensemble de notre équipe sans laquelle nous n’aurions jamais pu autant nous dépasser.
Et comme on s’y attendait, trois jours nous sont nécessaires pour récupérer, tant physiquement que mentalement. Ça tombe bien, puisque nous devons réaliser un test COVID en vue de notre traversée en Zambie dans une semaine. Ici, c’est 75$ et bien évidemment pas remboursé, mais on préfère rire de l’absurdité de la situation (vu que le virus n’existe pas dans le pays… pourquoi un test obligatoire pour le quitter?). Passons.
Lushoto (29/11 - 01/12)
Il est temps pour nous de dire au revoir à Arusha et toutes les aventures que la région nous a réservées, direction Lushoto et les montagnes Usambara. Le conducteur de bus a l’air confiant, et heureusement, car la 8ème et dernière heure de trajet s’effectue sur une route sinueuse à flanc de falaise.
Nous arrivons saines et sauves, et sommes accueillies par des trombes d’eau nous obligeant à nous abriter. Tant bien que mal, nous tentons de protéger nos sacs, mais c’est peine perdue pour nos chaussures et vêtements complètement trempés!
Heureusement le lendemain, nous nous levons avec un beau ciel bleu. On s’empresse d’étaler toutes nos affaires au soleil et partons pour une petite randonnée. Oui oui, on n’en a pas assez! Rassurez-vous, pas de grand sommet à escalader, mais de magnifiques villages à traverser.
Un gros merci à Google Maps bien utile depuis le début du voyage, car ici zéro panneau d’indication et plusieurs fractions du sentier faites maison.
Après une heure de marche, nos efforts sont récompensés par un fantastique point de vue sur la région et l’horizon. Nous nous perchons sur un énorme rocher afin d’apprécier le panorama et l’ambiance régnante reposante.
Nous sommes bien contentes d’avoir intégré Lushoto et ses environs à notre itinéraire, car même si notre passage y est de courte durée, il nous permet de recharger un peu les batteries avant de reprendre la route vers la capitale, et ce dans un cadre coloré et ressourçant.
En route vers la Zambie
(01/12 - 07/12)
Après trois jours d’attente (et de publication de blog) à Dar Es Salaam, nous nous rendons enfin à la gare pour prendre notre train à destination de Mbeya à la frontière avec la Zambie. Ah, voilà que le train est annulé!! Nous nous renseignons auprès d’autres voyageurs qui nous apprennent que le départ est repoussé à demain. On ne nous l’avait jamais faite celle-là encore! Mais du coup, ils attendent quoi tous ces gens? Et bien le train de demain, à même le sol! Si l’on nous assure que l’endroit est sécurisé, on nous recommande quand même de loger dans un hôtel pour la nuit afin d’éviter tous les moustiques de la gare susceptibles de transmettre la malaria. Bon, si vous insistez!
Une bonne nuit d’hôtel, et nous retournons à la gare le lendemain, en espérant cette fois-ci partir pour de bon. C’est qu’il nous reste quelques jours seulement sur le visa…
Par chance, le train arrive en gare avec seulement deux heures de retard, soit 25 au total! Cela ne semble agacer personne, mais on vous avoue qu’après deux mois ici, le manque d’organisation et la gestion catastrophique du temps atteignent nos limites.
Nous voilà au moins assurées d’arriver à la frontière à temps. Le voyage est bien plus fluide que notre dernière expérience sur rails, malgré les secousses habituelles et notre compartiment légèrement encombré.
Nous arrivons à Mbeya le lendemain en fin d’après-midi et y passons la nuit. Puis c’est l’heure de se diriger vers la Zambie. 15 minutes de tuk-tuk et 2h30 de dala dala surchargé, et nous sommes déposées au poste-frontière de Tunduma.
Armées de nos passeports, tests covid négatifs, carnets de vaccination pour la fièvre jaune et de nos dollars pour les visas, nous avançons confiantes mais stressées vers les autorités. Evidemment, ce qui devait arriver arriva. On nous refuse nos tests sous prétexte qu’ils ne sont pas assez récents: 8 jours au lieu de 7 (ben voyons). On essaie de se justifier en montrant les sites officiels indiquant que le test ne doit pas avoir plus de 14 jours mais rien n’y fait. Ils veulent nous retester. Hors de question pour nous, surtout que personne ne porte de masque!!! Ce type d’abus de pouvoir nous met hors de nous. A chaque rencontre avec les autorités (frontière, immigration, visa), c’est le même cinéma: ils ont le besoin de montrer leur supériorité, leur indispensabilité et que sans eux, nous avons pieds et poings liés. On ressent même le stress des autres locaux face à eux. Sauf que nous, on est en plus une bonne occasion de se faire de l’argent facile…. Bref, on n’a pas d’autre choix que de se calmer, on se confond en excuses, et après une heure de pourparlers, on nous laisse enfin passer. Stamp de sortie, suivi du tampon d’entrée en Zambie (avec un beau visa de 30 jours comme demandé cette fois)! C’est parti pour un nouveau pays!
Ressentis
NOS COUPS DE CŒUR
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Population accueillante et souriante
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Un pays diversifié dans ses activités: plages paradisiaques, observation d’animaux sauvages, treks et ascensions, vie locale et découverte d’éthnies reculées
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Des paysages incroyables et des expériences que l’on vit qu’une seule fois dans sa vie
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Diversité culturelle et tolérance religieuse
NOS DÉCEPTIONS
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Activités extrêmement coûteuses (plus de 66% de notre budget pour le pays)
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Temps de trajet très longs (train, bus, taxi, tuk-tuk)
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La gestion du temps et du service “hakuna matata” (“tranquille tranquille”, c’est marrant au début, mais après deux mois, on n’en peut plus)
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Nourriture redondante et pas très saine
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La ville de Dar es Salaam: très polluée et oppressante
Budget