Birmanie / Myanmar
20/11 - 09/12
Longtemps isolée, la Birmanie fait face depuis plusieurs années à un flux de visiteurs de plus en plus important. Nous avons voulu aller à la rencontre de ce pays encore méconnu et de son authenticité avant que le tourisme de masse ne s’en empare.
Lors de la préparation de notre itinéraire, nous sommes cependant surprises par la liste exhaustive des recommandations aux voyageurs et le nombre d’états du pays qui nous sont déconseillés. Nous remarquons au cours du voyage qu’ils sont en fait le reflet des enjeux actuels auxquels le gouvernement birman est confronté. Enjeux qu’il convient ici de détailler afin d’avoir, comme nous, une meilleure compréhension de ce pays et de toute sa richesse.
Sommaire
Histoire
Après plus d’un siècle de colonisation britannique, la Birmanie proclame son indépendance en 1948 (notamment grâce aux négociations du Général Aung San avant qu’il ne soit assassiné). En 1962, le Général Ne Win renverse le régime politique au pouvoir par un coup d’Etat militaire et instaure une dictature qui durera 26 ans. Une nouvelle constitution est établie, avec une nationalisation complète de l’économie. Les Etats birmans perdent toute autonomie au profit d’une administration centralisée.
En 1988, le bilan est désastreux: le pays sombre dans la pauvreté à tel point qu’il devient l’un des moins avancés au monde. N’oublions pas de préciser que le Général Ne Win gérait l’économie sur les conseils avisés de ses numérologues, allant jusqu’à supprimer les trois quarts des billets en circulation car non multiples de 9, son chiffre porte-bonheur. Les manifestations de mécontentement se multiplient et le 8 août 1988 a lieu la plus grande révolte populaire du pays: des millions de personnes défilent dans les rues pour dénoncer le régime au pouvoir et réclamer l’avènement de la démocratie. Elles se terminent en bain de sang, avec près de 4000 morts ce jour-là et des milliers d’arrestations.
Source
Dépassé, le Général Ne Win démissionne, mais l’armée se maintient au pouvoir en instaurant une junte militaire. La Birmanie est rebaptisée Myanmar (le choix d’appellation est libre à chacun) et de nombreuses villes changent de nom, à l’image de Rangoon qui devient Yangon.
C’est à cette période que Aung San Suu Kyi, fille du général et héros de l’indépendance Aung San, fait son apparition. Profondément choquée par la situation de son pays, elle fonde la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND) et devient leader naturel de l’opposition.
Face à sa popularité grandissante, l’armée arrête Aung San Suu Kyi et l’assigne à résidence. Pensant apaiser les tensions du pays et légitimer leur statut, les dirigeants organisent des élections libres en 1990, mais le résultat du scrutin décrédibilise totalement la junte avec une victoire écrasante de la LND (82%). L’armée refuse alors de reconnaître sa défaite et annule le résultat des élections.
Pendant près de 20 ans, la junte militaire dirige le pays d’une main de fer, réprimant violemment toute opposition et emprisonnant les dissidents. Les minorités ethniques sont également prises pour cible par l’armée birmane. Les violations des droits de l’Homme sont permanentes et leurs défenseurs sans cesse menacés.
En 2007, la hausse brutale des prix du carburant décidée par la junte se répercute sur les produits de première nécessité, entraînant un nouveau mouvement de protestation générale. C’est la “Révolution Safran”, à laquelle même les moines participent. Une fois encore, le régime au pouvoir réprime brutalement le soulèvement (usage systématique de la force), ce qui suscite de nombreuses condamnations internationales.
Les représentants des autres pays (y compris des Nations Unies) ne sont plus les bienvenus, et la junte va même jusqu’à refuser l’entrée de personnel humanitaire international suite au cyclone Nargis en 2008 qui touche près de 3 millions de personnes.
La même année, malgré l’état d’urgence du pays, une nouvelle constitution est adoptée à plus de 92% suite à un référendum marqué par de nombreuses intimidations et accusations de fraudes multiples. Cette constitution, élaborée sans la participation de l'opposition ni des minorités ethniques, permet à la junte militaire de perpétuer sa suprématie en s’octroyant automatiquement 25% des sièges du Parlement, et en prévoyant la tenue d’élections libres certes, mais uniquement d’un chef d’état avec une expérience militaire et non marié à un étranger. Cette mesure permet ainsi d’évincer Aung San Suu Kyi, mariée à un Britannique.
Sans surprise, les élections de 2010 sont largement remportées par la junte grâce à l’exclusion d’Aung San Suu Kyi et de son parti, ainsi que la prolifération de menaces les jours précédant le scrutin. Quelques jours plus tard, Aung San Suu Kyi est enfin libérée, après près de 15 ans en résidence surveillée.
En 2011, en vue de lever les sanctions économiques des Etats-Unis et de l’Union Européenne, le nouveau Président et ancien général Thein Sein décide de libérer plusieurs prisonniers politiques et accorde le droit de manifester pacifiquement et de se syndiquer. La LND est à nouveau libre de participer aux élections, tout comme sa représentante.
2012 voit l’éclatement des premières violences entre bouddhistes et musulmans dans l’Etat d’Arakan à l’ouest du pays. Elles marquent le début d’une longue série de massacres (meurtres, viols, pillages, incendies) envers la communauté Rohingya, désormais considérée par l’ONU comme l’une des minorités les plus persécutées au monde. Certaines organisations humanitaires sont priées de quitter le pays car accusées d’aider les musulmans en priorité, d’autres font carrément l’objet d’attaques directes, entraînant le rapatriement de nombreux travailleurs humanitaires et privant ainsi des milliers de personnes d’aide.
Parallèlement, plusieurs conflits ethniques reprennent entre l’armée birmane et les minorités, dont les droits sont négligés. Les paysans commencent également à protester contre la confiscation arbitraire de leurs terres par l’Etat.
En 2015, le Parlement rejette les propositions de réformes constitutionnelles visant à réduire le pouvoir des militaires et adopte plusieurs lois discriminantes à l’encontre des femmes et des minorités religieuses. Cette année marque également un tournant dans l’histoire birmane, puisque les élections se soldent par la victoire de la LND à la majorité absolue, résultat enfin reconnu par l’armée. Le Parlement désigne un proche d’Aung San Suu Kyi comme président, la constitution interdisant à cette dernière de se présenter. Le poste de conseillère spéciale de l’Etat (équivalent de premier ministre) est créé pour elle.
En 2016, elle mène les négociations de Panglong auxquelles participent le parlement, l’armée, les partis politiques, les groupes ethniques ainsi ques des observateurs de la société civile afin de coopérer et construire les bases d’une Union Démocratique. Ces espoirs sont balayés quelques mois plus tard lorsqu’un groupe armé musulman attaque plusieurs postes-frontières. Les représailles de l’armée sont terribles: une opération de nettoyage ethnique envers la communauté Rohingya est lancée, obligeant des centaines de milliers de personnes à fuir l’Etat Arakan vers le Bangladesh. Les Nations Unies qualifient ces actes de crimes contre l’humanité. Dans les Etats Shan et Kachin, les combats entre les forces de sécurité et les groupes ethniques armés sont quotidiens, provoquant également la fuite de plus de 20 000 birmans.
Un an plus tard, le scénario se répète: de nouveaux postes de police sont ciblés dans l’Etat Arakan, ce qui entraîne une nouvelle vague de répression, et les combats entre l’armée birmane et les groupes ethniques des autres états s’intensifient.
Contexte
A l’heure actuelle, trois grands défis s’imposent au gouvernement birman et entravent gravement sa transition démocratique entamée il y a plus de huit ans:
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La persistance des conflits armés avec les minorités ethniques
Plus de 130 minorités ethniques cohabitent en Birmanie. Mais la junte ayant toujours privilégié une unité nationale, elle a souvent nié leurs différences, les évinçant systématiquement du processus de décision. Réclamant une plus grande autonomie et une représentativité politique, ces communautés ont souvent créé leur propre groupe armé de rébellion contre le régime fédéral. Encore aujourd’hui, elles ont le sentiment d’être négligées, et les affrontements entre ces groupes et l’armée birmane restent très fréquents, notamment dans les états frontaliers (Arakan, Chin, Kachin, Kayah, Mon, Kayin, etc.).
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Le sort des Rohingyas (cas à part)
Minorité musulmane vivant dans l’Etat d’Arakan à l’ouest du pays, ils sont considérés par une grande majorité de birmans comme des clandestins originaires du Bangladesh. Apatrides, on leur refuse le droit de citoyenneté et ipso facto l’accès aux services de base (moyens de subsistance, soins de santé, éducation, fonction publique). C’est un véritable système d’apartheid qui a été mis en place. Les violences des dernières années ont fait près de 10 000 morts et ont conduit plus de 750 000 personnes à fuir la Birmanie pour se réfugier au Bangladesh. Accusée d’actes de génocide à l’encontre des Rohingyas devant la Cour Internationale de Justice, la Birmanie admet un possible manque de discernement entre rebelles et civils, et qu’il est probable qu’une force disproportionnée ait été utilisée, mais continue de minimiser l’ampleur des crimes et les conditions de vie des Rohingyas.
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Des méthodes abusives malgré un régime élu démocratiquement
Malgré l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement civil mené par Aung San Suu Kyi, l’armée détient une place centrale en contrôlant trois ministères régaliens: celui de la défense, de l’intérieur et des frontières. Indépendamment du résultat des élections, un quart des sièges du Parlement lui est attribué, ce qui empêche toute réforme constitutionnelle visant à réduire ses pouvoirs. Ainsi, les lois discriminatoires et répressives ne peuvent être révoquées. Les violences perdurent, les arrestations arbitraires se multiplient, et les violations des droits de l’homme sont monnaie courante.
Ainsi, le tracé de notre itinéraire en Birmanie est bien plus simple que prévu. Nous évinçons l’ensemble des régions touchées par les conflits armés, soit plus de la moitié du pays, et nous concentrons sur le centre.
Yangon & Environs
(20/11 - 28/11)
La traversée du pont nous amène à Myawaddy, première ville birmane à la frontière de la Thaïlande. De là, nous embarquons à bord d’un bus pour l’ancienne capitale Yangon. Neuf heures de trajet, dont la moitié s’effectue sur une route improvisée. C’est limite si la poussière ne commence pas à envahir l’habitacle, et sans bitume, les secousses sont pour le moins remuantes. Bref, le combo parfait pour aborder ce nouveau pays.
Nous atteignons notre destination en soirée où nous attend Ma Yu, ancienne collègue d’AAPP, et son mari. Nous rejoignons le centre-ville dans la remorque de leur pick-up, ce qui nous semble être le moyen parfait pour clôturer ce voyage.
Comme à son habitude, Ma Yu a préparé un véritable festin pour nous accueillir et nous introduire à la cuisine birmane: poulet et maïs frits, salade de tomates, salade de feuilles de thé, curry, riz et jus d’avocat. Un vrai régal, et de quoi nous revigorer pour les prochains jours.
Nous la retrouvons le lendemain au bureau d’AAPP, l’Assistance Association for Political Prisoners. Comme son nom l’indique, le but principal de l’organisation est de venir en aide aux prisonniers politiques de Birmanie. Avant, pendant et après leur incarcération:
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Avant, en surveillant et dénonçant les situations de violations des droits de l’homme, encore trop présentes en Birmanie: arrestations de manifestants, activistes et défenseurs des droits humains, usage récurrent de la force, fabrication de preuves, intimidations, sentences absurdes, etc.
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Pendant, en documentant les conditions de vie en prison (surpeuplement, torture, etc.) et en proposant au gouvernement des projets de réforme pour les améliorer.
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Après, en fournissant une formation aux prisonniers politiques afin de faciliter leur réinsertion dans la société, et en leur offrant ainsi qu’à leur famille une aide psychologique.
A travers ses rapports et sessions informatives, AAPP tente aussi de sensibiliser le grand public, tant au niveau national qu’au niveau international, afin de peser plus face aux dirigeants politiques.
Fondée en 2000 à Mae Sot par d’anciens prisonniers politiques, l’association n’a pu ouvrir son bureau à Yangon qu’en 2012 par mesure de précaution. Sa mission ultime est de libérer l’ensemble des prisonniers politiques en Birmanie pour que le pays puisse enfin atteindre la réconciliation nationale à laquelle il aspire. Sa vision est également d’intégrer ces anciens détenus au processus de démocratisation birman afin qu’ils puissent aider à réformer le système carcéral et contribuer à l’élaboration de lois respectueuses de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et des traités internationaux.
Le musée d’AAPP retrace les heures sombres de la Bimanie et l’évolution de l’organisation depuis sa création. Sa visite s’effectue dans l’émotion, et nous nous sentons encore une fois toutes petites face à ces individus qui n’ont pas hésité à mettre leur vie en péril au nom de la liberté et de la justice.
Après ce moment hors du temps, nous consacrons le reste de la journée à la visite de Yangon, de son marché principal, de ses rues aux maisons colorées et parfaitement raccordées à l’électricité.
Nous n’oublions pas la Shwedagon Pagoda, emblématique de Yangon. La plateforme est accessible par des escaliers et escalators aux quatre points cardinaux. Le site est constitué de 72 édifices religieux (stupas, pyatthats, salles de prière…) avec en son centre la pagode principale elle-même cernée de 64 petits pagodons. De ses 99 mètres de haut, elle constitue l’un des monuments religieux les plus connus au monde et le plus sacré en Birmanie. Entièrement recouverte de feuilles d’or et sertie de pierres précieuses, nous sommes littéralement éblouies. Il nous est en effet difficile de maintenir le regard sur la pagode plus de quelques secondes tellement elle scintille. Mais quelle grandiosité!
Nous poursuivons notre passage à Yangon avec notre mission de volontariat au centre Thabarwa en périphérie de la ville, dont vous pouvez trouver le descriptif ainsi que nos ressentis ici. Nous y passons cinq jours, avant de prendre la route vers l’immanquable Bagan.
Bagan (28/11 - 01/12)
Nous optons pour un bus de nuit pour nous y rendre. Le transport se passe confortablement et rapidement, si bien que les yeux piquent lors de l’arrivée à 6h du matin. Les chauffeurs de taxi sont déjà sur le qui-vive pour nous proposer leurs prix triplés, mais malgré la fatigue, nous arrivons à négocier le trajet à un prix raisonnable. Il nous tarde vraiment de visiter ce lieu incontournable de la Birmanie. La plaine de Bagan, avec ses 2800 temples bouddhistes et hindous, est vraiment considérée comme LE lieu à ne pas manquer lors d’un voyage dans le pays. Le site a d’ailleurs été classé au patrimoine mondial de l’Unesco en juillet 2019.
Nous louons un scooter électrique (belle surprise écologique!) pour visiter la plaine qui s’étend sur 40 km². Le site est un véritable bijou qui témoigne de la riche histoire birmane. Les temples, construits entre les Xème et XIIIème siècles, ont certes été touchés par le tsunami de 1975, et plus récemment par le tremblement de terre de 2016, mais beaucoup de ressources ont été et sont mises en place pour rénover la zone archéologique de Bagan. On comprend pourquoi autant d’efforts sont investis dès lors que l’on voit ce paysage unique au monde et que l’on ressent cette atmosphère tellement reposante.
Nous ne perdons pas de temps et nous voilà donc parties à l’aventure sur notre petit scooter dès 7h du matin en direction de temples choisis au hasard sur Google Maps.
Les chiens errants sont nombreux en Asie, et forcément, nous apercevons aussi de nombreux chiots au cours de notre voyage, au plus grand bonheur d’Anouck. Justement, quatre petites boules de poils viennent à notre rencontre au pied d’un temple. Dire qu’Anouck est heureuse à ce moment là est un euphémisme, et c’est tout naturellement que nous accordons plus d’importance à ces petites bêtes plutôt qu’à l’immense pagode qui se dresse devant nous!
Etant donné la chaleur écrasante, nous essayons toujours de privilégier les visites en matinée et fin de journée afin d’admirer le coucher de soleil. Sur le chemin, Anouck nous montre ses talents de pilote de rallycross et on frôle la catastrophe.
Notre seconde journée à Bagan consiste en un défilé de temples et pagodes, tous plus magnifiques les uns que les autres. Nous sommes surprises par leur diversité: il y en a de toutes les couleurs, formes, architectures et matériaux. De quoi ne pas se lasser!
Nous contemplons le coucher de soleil au bord de la rivière Irrawaddy qui traverse Bagan. Ce soir-là, les tons oscillent entre rose et violet, et les bateaux de pêcheurs qui reviennent de leur journée de travail rendent ce tableau encore plus vivant !
Pour notre dernière journée, on se dit qu’on ne peut pas passer à côté d’un lever de soleil à Bagan et on se motive pour se réveiller aux aurores. On se les caille sec sur notre scooter à 5h du matin… mais le froid se fait vite oublier avec le soleil qui pointe le bout de son nez. C’est désormais un tableau orangé qui se dessine devant nous.
Pas plus d’une heure plus tard, les premières montgolfières décollent pour nous offrir le plus beau des spectacles qu’il nous ait été donné de voir à Bagan (et sans doute l’un des plus beaux depuis notre départ). Seul le bruit des brûleurs se fait entendre, ce qui donne une atmosphère particulière à ce moment, presque réconfortante.
On se dit qu’à bord, le show de 380$ doit valoir le coup, mais clairement hors budget, on ne regrette pas du tout notre petite excursion matinale.
On profite d’une après-midi de plus pour visiter, et on finit la journée avec un beau coucher de soleil… entourées d’une bonne centaine de touristes. Généralement, on a tendance à fuir les endroits trop fréquentés, leur préférant les lieux plus intimistes. Mais il s’avère qu’il s’agit de l’une des seules vues d’ensemble sur la plaine encore accessible. En effet, afin de préserver les édifices archéologiques, il est maintenant interdit de monter sur les monuments pour admirer les vues à 360°. Mesure adoptée par le Ministère de la culture pour protéger le patrimoine culturel vis à vis des pagodes qui sont des endroits sacrés. Dommage, mais on comprend. Cela reste tout de même magnifique.
Kalaw & Environs
(01/12 - 04/12)
Nous remarquons vite qu’en Birmanie, les bus de nuit représentent le moyen de transport le plus rentable pour les longues distances. C’est donc naturellement que nous voyageons à bord de l’un d’entre eux pour effectuer le trajet Bagan - Kalaw. Nous notons également que peu importe la durée du voyage, les bus partent toujours aux alentours de 22h, même si cela signifie arriver à destination au milieu de la nuit. Cette étape n’échappe pas à la règle, et nous voilà à errer dans les rues de Kalaw à 2h30 du matin (coucou les mamans)! Il fait super froid, et sans réservation d’hôtel, nous marchons à l’aveugle à la recherche d’un hébergement ouvert. Promis, un jour, on tirera les leçons des expériences passées. Nous en trouvons un une vingtaine de minutes plus tard, mais hôtel complet oblige, nous ne pouvons pas accéder à notre chambre avant 9h du matin, heure à laquelle la plupart des trekkers quittent les lieux. Une employée nous fournit des couvertures et nous autorise à dormir sur les canapés de l’entrée, et nous nous retrouvons donc à finir notre nuit au milieu de la réception. Nous profitons de la journée pour récupérer avant le trek prévu les prochains jours. Repas dans un petit buibui Népalais réputé dans cette petite ville qui ressemble à une station de montagnes.
Le lendemain matin, reposées et bien repues, nous sommes prêtes pour un autre incontournable de Birmanie: le fameux trek entre Kalaw et Inle Lake. Cette randonnée d’un peu plus de 60 km à travers l’état Shan s’effectue généralement sur trois jours, le temps d’en apprendre un maximum sur cette minorité et son mode de vie.
Par chance, le couple qui devait nous accompagner a reporté son excursion, et notre trek en groupe se transforme en trek privé avec notre guide local David Kham (plus connu sous le nom de David Beckham ;-) ah, ces birmans alors!).
Notre randonnée commence par une étape en forêt, pendant laquelle nous faisons connaissance avec David. Âgé d’une vingtaine d’année, il accompagne régulièrement des marcheurs sur ce trajet pour pratiquer l’anglais en complément de ses études à l’université.
Le trek n’est pas réputé difficile, le dénivelé n’est pas important, juste ce qu’il faut pour avoir de magnifiques points de vue sur la vallée.
Les paysages sont très diversifiés, entre montagnes, rizières, arbres centenaires, villages locaux, rivières et champs de culture.
Sur le chemin, David nous familiarise d’ailleurs avec plusieurs ressources cultivées dans la région, telles que les haricots, les tomates, le thé, l’ail, le gingembre, l’avocat et le piment.
Piment
Piment
Piment & Ail
Riz
Tomates
Gingembre
Tomates
Haricots
Au repas de midi, nous comprenons que nous ne risquons pas de mourir de faim durant ces trois jours.
Anouck se découvre également une passion pour les buffalos, à en croire la multitude de photos sur son téléphone.
Dans l’après-midi, nous croisons plusieurs travailleurs des champs. De loin, ces derniers effectuent de grands gestes étranges. En nous rapprochant d’eux, notre guide nous explique qu’ils sont en train de purifier le riz de toute brindille à l’aide d’éventails géants.
Nous arrivons chez notre famille d’accueil vers 17h, après 20 km de marche. Nous profitons encore de la clarté du jour pour nous laver dans la douche du village, c’est-à-dire dans un rectangle de briques haut de 1,50m (adapté à la taille des locaux). Accroupies donc, nous nous rafraichissons, littéralement, aux buckets d’eau glacée. Nous rejoignons ensuite la maison de notre famille et sommes agréablement surprises de voir qu’une pièce nous est réservée.
Nous dégustons ensuite le repas préparé par un habitant du village: salade de tomates, curry de poisson, ratatouille locale, riz et papaye.
Nous terminons par le traditionnel thé vert en compagnie de notre guide. Nous le questionnons sur ses rêves, et il nous apprend vouloir une très grand famille avec sept ou huit enfants, comme la sienne. Quand nous lui demandons pourquoi, il nous explique qu’ici, il n’y a pas vraiment de système de retraite, et que les enfants représentent l’unique source de revenus des parents lorsqu’ils ne sont plus capables de travailler. Nous mesurons encore une fois notre chance de ne pas avoir à nous préoccuper si jeunes de ce type de choses.
Départ à 7h le lendemain après une bonne nuit de sommeil, emmitouflées dans nos épais duvets. Le panorama qui s’offre à nous est alors incroyable: nous marchons au-dessus des nuages avant de voir la vie en rouge avec tous ces chilis qui nous entourent !
En fin de matinée, quatre autres randonneurs se joignent à nous pour le reste du trek. Ils ont choisi la formule 2 jours/1 nuit et ça se voit: ils cavalent en tête alors que l’on commence à bien ressentir les kilomètres de la veille. Heureusement, le lunch de midi arrive vite pour nous requinquer. Nous poursuivons notre avancée au milieu des champs qui nous rappellent un peu beaucoup notre si beau pays.
Dans l’après-midi, nous faisons une halte au bord d’une rivière pour reprendre des forces. Nous y rencontrons deux femmes Shan nettoyant leur buffalo après leur dure journée de labeur. Evidemment, Anouck ne peut résister à l’envie de piquer une tête avec son nouvel animal préféré.
Bien entendu, notre hébergement se situe après un village derrière une colline, elle-même juste devant une dizaine de rizières qu’il nous faut traverser. De quoi bien nous achever avant l’arrivée. Mais la beauté des paysages nous pousse à avancer et à donner le meilleur de nous.
Bon, honnêtement, on a vraiment très très hâte d’arriver, surtout qu’Anouck a troqué ses baskets de randonnée contre ses tongs tellement les pieds nous font souffrir.
Vers 16h30, nous arrivons enfin à destination, un monastère perdu au milieu des montagnes. Nous y passons la nuit, juste après nous être rafraîchies au bucket usuel et un repas gargantuesque.
La reprise au 3ème et dernier jour est particulièrement pénible, surtout au moment de remettre les baskets. On débute la randonnée une nouvelle fois la tête dans les nuages, et on commence à y prendre vraiment goût.
Après s’être acquittées des frais d’entrée du site d’Inle Lake, notre destination finale, nous quittons le chemin principal et nous dirigeons hors des sentiers battus pour traverser des terres rouges au milieu des troupeaux de bétail.
En voyant le terrain accidenté qui nous attend, on se dit clairement que la fin du trek ne va pas être de tout repos: caillasse et contournement de rochers sont au rendez-vous, de quoi ravir nos petits petons. Les tongs d’Anouck sont à nouveau les bienvenues.
Les derniers mètres sur le bitume s’apparentent davantage à la Cour des miracles qu’à un groupe de randonneurs aguerris, mais le repas de midi clôture cette expérience en beauté.
Bilan de cette escapade? 63 kms, neuf ampoules à nous deux et une tendinite, mais surtout des images plein la tête et des souvenirs inoubliables. Par contre, le prochain trek attendra un peu (beaucoup), le temps de refaire le stock de pansements.
Lac Inle (04/12 - 06/12)
Nous voilà à l’embouchure du Lac Inle, autre trésor de Birmanie. Reconnu par l’Unesco comme réserve de biosphère, l’endroit est totalement encerclé de montagnes et nous plonge directement dans un décor digne d’une carte postale. Pour accéder aux villages environnants, tout se fait à pirogue, avec moteur de préférence pour les longues distances. C’est ainsi que nous montons à bord de notre embarcation. Coup de coeur dès les premières minutes de navigation: ce mode de transport nous fascine et on se sent totalement immergées dans un autre mode de vie de la région.
L’immensité du lac nous impressionne, et ses 22km de longs semblent disparaître à l’horizon. Emblématique du pays, ce lieu est notamment célèbre pour la façon unique dont rament ses pêcheurs. Debout sur une jambe à la poupe de leur pirogue (sans moteur pour eux), ils enroulent l’autre jambe autour de leur pagaie. Ils manoeuvrent donc à la force des jambes, et gardent ainsi les mains libres pour manier leur filet ou leur nasse.
Sur le chemin, nous faisons halte à deux ateliers d’artisanat: le premier est un atelier d’argenterie tandis que le second est un atelier de tissage tenu par des femmes girafes issues de la tribu Kayan. Nous apprenons que les colliers-spirales sont portés dès l’âge de 5 ans. Les spirales sont remplacées par d’autres plus longues au fur et à mesure de la croissance, sachant qu’une femme peut porter jusqu’à 8kg de colliers, répartis entre le cou principalement, les poignets et les genoux. L’origine de cette tradition est floue, tantôt pour se protéger des morsures de tigres, tantôt pour enlaidir les femmes et éviter qu’elles se marient avec des hommes d’une autre prévue. Aujourd’hui, il s’agit avant tout d’un signe d’identité culturelle.
Ces ateliers tout comme l’ensemble des habitations aux abords du lac Inle sont construits sur pilotis, ce qui fait tout le charme de ce lieu unique.
Faute de temps, nous n’y passons qu’une nuit, ce qui nous suffit pour découvrir la ville très animée de Nyaung Shwe. Nous en profitons quand même pour nous reposer du trek avec un massage traditionnel avant de rejoindre l’étonnante ville de Hpa-An.
Hpa-An (06/12 - 09/12)
En effet, sur la route reliant Myawaddy à Yangon au tout début de notre périple dans le pays, nous avons été agréablement surprises par les paysages défilant sous nos yeux: d’immenses montagnes telles la Baie d’Halong au Vietnam, mais au fin fond de la Birmanie.
Curieuses, nous apprenons plus tard qu’il s’agit de la ville de Hpa-An, encore un peu secrète aux yeux des touristes! Nous l’ajoutons de suite à la liste et la gardons pour le chemin du retour. Par chance, nous trouvons un bus desservant Hpa-An depuis Inle Lake. 12 heures de trajet, de nuit pour pas changer. Et une arrivée de plus aux aurores! Heureusement, les hôtels, habitués par la déferlante de touristes arrivant à des heures matinales, font le mieux pour nous accommoder. Nous avons donc la chance de pouvoir faire notre check-in dès 7h du matin. Nous sommes bien contentes de notre hôtel “budget” car il offre une vue splendide sur la ville du dernier étage.
Le lendemain, nous louons un scooter pour la journée afin de visiter Hpa-An et ses alentours. Nous prenons la route assez tôt pour éviter les grosses chaleurs, non sans avoir avalé un bon petit-déjeuner de samosas. 1h30 de route accidentée (cela devient une habitude!) et une libération de biquette plus tard, nous arrivons à la fameuse Grotte de Sadan.
La grotte est gigantesque, et les différentes statues de Bouddha à l’entrée augmentent encore plus cette impression d’immensité.
Il nous faut près de 20 minutes pour traverser toute la grotte, elle-même séparée par plusieurs salles abritant d’autres statues religieuses et pagodes. On se sent vraiment toutes petites face à tant de hauteur, et les mini chauve-souris au dessus de nos têtes peuvent en témoigner!
La sortie de la grotte face au lac et aux bateaux en bois qui nous attendent est digne d’un film!
Nous ne manquons pas de monter à bord d’une de ces embarcations traditionnelles pour faire le chemin inverse. Sans moteur et face au vent, nous avançons (très) lentement et avons un peu de peine pour notre batelier. Mais c’est tellement paisible!
Les derniers mètres pour rejoindre le parking nous en mettent plein les yeux. Des rizières toutes plus verdoyantes les unes que les autres entourées de montagnes karstiques démesurées.
Nous prenons ensuite la route pour le jardin de Lumbini et ses 1000 bouddhas. Nous sommes cependant un peu déçues de cette visite bien moins reposante que prévue. Apparemment, les birmans ont pensé que cela serait agréable d’installer une mini fête foraine agrémenté d’un petit téléphérique au milieu des jardins… Dommage!
Notre journée visite se termine à Kyaik Ka Lat, un célèbre piton rocheux surmonté d’une pagode. Erigé au milieu d’un petit lac, l’atmosphère y est beaucoup plus apaisante, notamment avec la montagne sacrée du Mont Zwegabin en arrière plan.
Nous rentrons à temps pour admirer le coucher du soleil qui domine la ville du toit de l’hôtel.
Au bord de la rivière, on a carrément l’impression que le ciel s’enflamme!
Nous rejoignons ensuite Khaing Zaw Win, un ancien collègue d’AAPP, au nouveau marché de nuit de Hpa-An et discutons autour d’un verre avec ses amis.
En fin de soirée, nous croisons une chorale d’enfants chrétiens qui s’arrêtent devant les maisons pour chanter des chants de Noël traditionnels birmans. Moment très émouvant à l’approche de Noël loin de nos familles…
Ressentis
NOS COUPS DE CŒUR
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Une histoire et culture riches
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Pays peu touristique donc
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Pays encore authentique
NOS DÉCEPTIONS
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Transports peu arrangeants (bus qui arrivent au milieu de la nuit)
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Des zones trop difficiles d'accès et dangereuses
Budget